good timing

Cela faisait un petit moment que Dean n'avait plus rendu visite à ses grands parents. Ce n'était pas comme si tout un monde les séparait aujourd'hui, c'était juste qu'il ne se prenait malheureusement pas assez le temps pour aller les voir. Et aussi parce que trop distrait, il s'en rappelait en fin de journée quand il était déjà couché au lieu de s'en souvenir au réveil. Des jours de repos il en avait eus depuis, et il aurait pu venir avant. Il remerciait sa mère de lui avoir fait penser ce matin. Il ne travaillait pas, il n'avait rien de prévu, c'était donc le moment idéal. Et sa grand-mère arrêterait de se faire du souci pour lui. Il espérait du moins. Parce qu'elle s'en faisait toujours.
Et à peine fut-il arrivé que deux bras l’encerclèrent. Il ne put s'empêcher de rire, attendri face à l'attitude de la vieille femme, la serrant en retour avant qu'il ne grimace quand elle lui pinça la joue en rouspétant que ça faisait longtemps et qu'il attendait peut-être une invitation pour venir les voir. Ce fut à ses jambes d'être attaquées ensuite, Bambi voulait aussi l'attention du fleuriste. Et la voix de son grand-père résonna en fond sonore, réveillant le rire de sa grand mère et le faisant grimacer un peu plus : « On a presque cru que tu t'étais perdu en chemin, distrait comme tu es »
Cela dit, ça aurait pu arriver, connaissant Dean... et ça lui était déjà arrivé, d'ailleurs. Il voulait se rendre chez ses aînés mais avait fini dans une boutique de bandes dessinées. Même lui n'avait pas compris comment en en sortant trois heures plus tard. (Et il n'était pas allé voir ses grands parents du coup).
Il s'installa confortablement au salon, sa grand-mère lui pinça tendrement les joues tout en lui posant un tas de questions. Ils parlèrent longuement, jusqu'à ce qu'il soit l'heure de promener Bambi. Le chien n'avait pas lâché Dean depuis son arrivée. Ce fut donc lui qui se proposa de sortir, sous un « N'oublie pas le chien en cours de route » de son adorable grand-père.

Cela faisait quelques minutes qu'il se promenait maintenant, Bambi devant lui. La chienne semblait s'amuser avec des feuilles mortes et il la laissait faire en la regardant, amusé. Sauf que l'amusement était trop fort et la chienne commença soudainement à courir dans tous les sens, affolant Dean qui n'arrivait pas à suivre. « Bambi », qu'il s'exclama doucement en agitant les mains, « Calme toi Bambi ce sont que des feuilles », il lança un regard suppliant, dans une petite moue boudeuse, le nez plissé, les joues gonflées. « Bambi s'il te plait », qu'il ronchonna lentement, « Me fais pas courir part.. Non Bambi on mange pas les feuilles ! », scandalisé qu'il était le Dean en avançant vers le chien, redressant sa frimousse vers une jeune femme dans un petit souffle perturbé, avant de lui offrir un sourire sympathique. « Bambi. Viens. Oui c'est bien Bambi », qu'il chantonnait presque en dorlotant le canidé, des petits rires discrets vibrant dans sa gorge alors qu'il lui ôtait les feuilles de son pelage.

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L’adolescente avait décidé de se promener en espérant pouvoir être quelque peu seule. Elle ne l’avait pas été depuis bien trop longtemps. Lorsque ce n’était pas sa dame de compagnie ou sa baby-sitter qui étaient auprès d’elle, c’était son fiancé qui aimait trouver mille et une occasions de se voir. Dambi espérait profiter du calme de cette fin d’automne, une veste autour de son corps et le regard plongé vers ces dizaines d’arbres. Ils perdaient leurs feuillages et elle trouvait cela sublime. Non seulement parce que tout ce qui se rattachait à la botanique lui allait droit au cœur, mais aussi et surtout car la fin de l’automne annonçait sa saison préférée : l’hiver. Savoir que bientôt les arbres auraient des branches nues couvertes de neige la mettait en joie.

Le vent soufflait fort et elle replaça son bonnet sur son crâne. Les feuilles ne cessaient de voler, si bien qu’elles commença à en attraper quelques-unes pour son herbier annuel. Une feuille, puis deux, puis trois. De couleurs, de tailles, d’origines différentes. C’est alors qu’elle ramassait toutes ces feuilles qu’elle entendit une voix prononcer haut et fort son surnom. Bambi. Le petit animal des forêts. La brune se redressa puis pivota, cherchant d’où pouvait bien provenir cette voix inconnue. C’était rare d’entendre un tel mots, aussi elle se demandait si c’était quelqu’un qui la connaissait. Encore plus lorsque la personne parla de feuilles et d’absurdités liées à elle. C’était un homme de dos, et elle se demanda un instant s’il ne venait pas de se retourner juste lorsqu’elle le cherchait du regard. « Mais... Je ne mange pas de feuilles. » Et c’était vrai, elle ne faisait que les collectionner. Qui aurait eu l’idée stupide de manger des feuilles ? Vraiment ?

La lycéenne s’avança jusqu’au garçon pour lui tapoter le dos. « Hé, de une ce ne sont pas que des feuilles. De deux, je ne mange pas de feuilles. » Son regard se faisait rond lorsqu’elle découvrit son visage, un faciès qui lui était bien inconnu. Pourtant il devait bien exister une explication. Comment pourrait-il connaître son surnom autrement ? Les feuilles entre les mains, elle faisait attention à ce qu’elle ne se froissent pas. C’était compliqué de trouver des feuilles en parfait état qui pouvait rendre bien dans un herbier. « Comment tu connais mon surnom ? On se connait ? » Elle essayait, de toutes ses forces elle essayait de mettre un nom sur son visage. Mais c’était impossible. Elle n’y arrivait pas malgré tous ses efforts. Pour Dambi, cet homme lui était inconnu. « Tu viens bien de m’appeler Bambi ? » Elle baissa son regard pour découvrir un petit animal tout mignon, dont elle s’écarte pour éviter sur ses pattes ne touchent ses collants. Ses feuilles tombèrent et une moue boudeuse se dessina sur son visage. Voilà tout ce qu’elle avait gagné.

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L'air était le même. Le paysage aussi. Pourtant, tout était différent. Dean adorait marcher dans les feuilles mortes, écouter ce petit crissement sous ses pieds était comme une douce mélodie, une sorte de berceuse enfantine laissant naître une fine esquisse sur ses lèvres. Il ne trouvait pas cela qu'amusant, il trouvait cela relaxant, aussi. Cela avait un côté apaisant, même si c'était étrange à dire. Il adorait voir ces peintures étalées sur le sol, ces couleurs somptueuses et lumineuses qui s'étendaient à ses pieds, comme un tapis spécialement créé pour lui. Un tapis de feuilles, de douceur, de couleurs, dans cette ambiance calme, feutrée mais fraîche. Il se souvenait de ces journées, de ces balades dans le parc, où il passait son temps à courir partout, son père et sa mère le suivant. Il se souvenait de leurs rires, les échos se répercutant encore dans ses pensées comme cette vieille chanson dont on ne pouvait se passer. Sourire tendre, mais triste. Regard pétillant mais brillant. Il adorait autant qu'il détestait se remémorer ce genre de moments. Il détestait autant qu'il adorait s'en rappeler comme si c'était hier, alors que tout ça remontait à bien plus loin encore. C'était horrible comme il n'arrivait pas à s'en détacher. Même si tout avait changé tout autour de lui, Dean était resté le même.

Observant Bambi jouer avec les feuilles, il ne pouvait s'empêcher de pouffer discrètement, amusé par le comportement de la chienne. Elle semblait confondre les feuilles avec ses jouets, se roulant et courant après au moindre coup de vent. C'était adorable, même si elle ne faisait que se salir un peu plus à chaque fois. « Crache Bambi, crache », qu'il fit, soudainement horrifié en la voyant mastiquer joyeusement une feuille. Il agita les mains dans un air angoissé, la chienne lâchant les feuilles pour trottiner tranquillement comme si rien ne venait de se passer. Il sursauta quelque peu, et se tourna vivement, faisant face à une jeune femme. Il cligna des paupières, penaud. Qu'est-ce que... ? Il se pinça les lèvres, perturbé , confus, perdu. « C'est... oui... d'accord... », qu'il murmura doucement, l'air de plus en plus perplexe. Pourquoi lui disait-elle qu'elle ne mangeait pas de feuilles ? Heureusement pour elle qu'elle ne mangeait pas les feuilles sur le sol, c'était sale. En parlant de ça... il lança un regard vers Bambi, les sourcils un brin froncés quand il la vit à nouveau mastiquer des feuilles. Il secoua son visage, la réprimandant silencieusement, la chienne relâchant encore une fois la feuille et s'agitant comme si elle était l'être le plus gentil de la terre. Il sourit, satisfait, reposant son regard sur la jeune femme, sursautant une seconde fois parce que oui, il l'avait oubliée. Son surnom ? Il plissa un peu les yeux et pencha la tête sur le côté, non sans l'avoir secoué négativement avant. « On se connaît ? », qu'il répéta, « Est-ce qu'on se connaît ? », et il paraissait un peu paniqué, maintenant, à l'idée de se dire qu'il avait oublié qui elle était. « Je viens de... qu... », il la regarda, et se mit à rire, libérant ce rire bien distinct qui le caractérisait. Il cacha sa bouche de sa main, les pommettes un brin rosies. Il lui offrit un sourire désolé et inclina doucement le visage. Son regard tomba sur la chienne qui sautillait sur place, demandant l'attention de la jeune femme, avant qu'elle ne reparte dans une course contre une feuille... qu'elle dévora. « Bambi... », soupira-t-il doucement dans une petite grimace. Ses prunelles se posèrent sur la jeune femme, la détaillant silencieusement dans une moue gênée. « Elle s'appelle Bambi... », expliqua-t-il, mais sa vis-à-vis avait dû le comprendre depuis. « Désolé », il inclina à nouveau son visage, ses iris l'observant avec précision, la tête quelque peu basculée sur le côté. « On se connaît ? », c'était tout Dean ça, de reposer la même question que quelques minutes plus tôt.

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D’abord, le jeune inconnu sembla perturbé et confus. Pourquoi parlait-elle ? C’était ce que l’on pouvait littéralement lire sur son faciès. Ce dernier se tourna vers le petit animal à quatre pattes, qu’il réprimanda et, lorsque le chien eut obéi, il se concentra une nouvelle fois sur l’adolescente. Il ne faisait que demander s’ils se connaissaient, ce à quoi elle répondit par un hochement de tête négatif. Dambi ne se souvenait plus de lui, mais il devait bien la connaître pour l’avoir appelé par son surnom. Il ne pouvait pas en être autrement. Ses sourcils s’arquèrent. Elle lui semblait inconnue, tout autant qu’il l’était pour elle. Le jeune homme posa une nouvel fois son regard sur elle avant de rire, rire qu’il cacha de sa main avant d’incliner son visage. Que lui arrivait-il ? La lycéenne suivit le regard de cet inconnu qui se posait sur l’animal, un soupire et des mots expliquant la situation. « Ah… » Ce n’était pas elle, mais l’animal qu’il avait appelé. Drôle de situation ! Soudainement, elle se senti stupide et gênée. Ce petit chien portait le même nom et pour une blague du destin, c’en était une très drôle.

Les mains sur la laine, elle resserra son bonnet sur son crâne alors même qu’elle aurait voulu disparaître à l’intérieur. Voilà qu’elle était apparue devant lui sans aucune raison, alors qu’il parlait à son animal et non à elle. Quelle stupide lycéenne ! Un pied sur le côté, elle voulu partir en s’excusant, mais cette même question traversa une nouvelle fois ses lèvres. Se connaissaient-ils ? Dambi pinça ses lèvres en essayant de comprendre et plissa les yeux en analysant son faciès. Il est vrai qu’il ne lui était pas tant inconnu, finalement. Mais cela voulait-il réellement dire qu’ils se connaissaient ? Jeju a toujours été peu peuplée, une petite île où presque toujours les mêmes personnes se croisent. « Non. Je ne crois pas… » La brune positionna une main sous son menton. Elle ne croyait pas, cela ne signifiait aucunement qu’elle en était certaine. Ce n’était pas l’élève la plus douée de son école, tout comme elle n’était pas celle ayant la plus grande mémoire, mais elle devait tout de même avouer que son visage ne lui était pas inconnu. « C’est… C’est juste une coïncidence que ton animal se nomme Bambi. » Elle lui offrit un sourire gêné. Il n’y avait pas d’autres explications, ça ne devait être qu’une coïncidence. Non ?

L’adolescente s’accroupit pour ramasser les feuilles qu’elle venait de faire tomber au sol, les ramassant unes à unes alors qu’elle voyait le petit chien s’approcher d’elle. Des souvenirs refaisaient lentement surface dans sa mémoire, le visage de l’inconnu s’affichant devant son regard sans même qu’elle ne veuille s’en souvenir. Dambi entendait des rires d’enfants, les bruits de tasses de thé, les voix de deux vieilles femmes. Elle se revoyait du haut de ses sept ans jouer avec un oppa, déjà adolescent. Les feuilles en main, elle releva ses pupilles vers le jeune homme près d’elle. « Oppa ? » Ses yeux étaient emplis d’une interrogation. Un souvenir lointain lui revenait, celui d’un garçon qui venait avec sa grand-mère jouer chez elle, seulement parce que les deux vieilles femmes étaient de grandes amies. « Tu ressembles à un Oppa que j’ai connu lorsque j’étais enfant. » Un rire nerveux passa ses lèvres et elle se releva pour s’incliner poliment devant lui, les feuilles en main presque broyées. « Je suis désolée. C’est idiot. » C’était impossible, ça ne pouvait pas être lui. Comment le pourrait-il ?

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Si partir à l'autre bout du monde ne pouvait pas l'aider, qu'est-ce qui pourrait l'aider encore ? Qu'est-ce qui changeait ici, finalement ? Il y avait la distance. Son pays d'origine était loin. Et il avait la chance de ne pas passer devant le parc où tout avait changé quotidiennement. Il voyait autre chose, découvrait d'autres choses. Il changeait de point de vue, il se faisait d'autres ami.e.s, il rencontrait d'autres gens. Il travaillait, s'occupait, se changeait l'esprit. Plus ou moins. Parce que tout finissait par revenir. Le soir, surtout. Puis parfois au beau milieu de la journée. Il savait, le sous-entendu qu'il y avait, quand sa mère lui demandait s'il allait bien. Il savait que ce même sous-entendu était présent quand ses grands-parents s'adressaient à lui. Et il voyait, dans le regard de sa mère, de sa grand-mère, toute l'inquiétude qu'elles avaient. Et il voyait dans les gestes de son grand-père, toute l'inquiétude qu'il cachait lui aussi.

Il était tout de même ravi d'être ici. Il pouvait passer plus de temps avec eux. Et avec Bambi, aussi. Adorable boule de poils qui semblait prendre un malin plaisir à manger des feuilles. Comme si elle savait qu'elle n'avait pas le droit. Elle le faisait malgré tout, et on ne pouvait pas dire que Dean était un exemple même d'autorité affriolante. Il était plutôt dans l'autorité douce... et en voyant la chienne, on comprenait que ce n'était pas forcément efficace tous les jours – mais au moins il essayait. Il aurait continué à maugréer contre l'animal, et à s'amuser aussi, mais il fut interrompu par une jeune femme. Il ne comprenait pas pourquoi elle lui parlait mais il l'écoutait et répondait. Poliment. Il était persuadé de ne pas la connaître. Après, c'était peut-être simplement qu'il avait oublié. Connaissant Dean, ce ne serait pas impossible non plus. Ca lui arrivait rarement, d'oublier un visage ou un prénom, mais ça pouvait arriver – et puis il ne fallait jamais dire jamais. Surtout pas avec lui.
Aux mots de la jeune femme, il pencha un peu son visage, la détaillant silencieusement, les lèvres pincées. Il la dévisagea, plissa un peu le nez, et pencha son visage de l'autre côté comme si cela changeait quelque chose. Il jeta un regard à la chienne et se mit à sourire bêtement en la voyant s'asseoir à ses pieds, la truffe levée vers la jeune femme comme si elle aussi, elle cherchait. Un faible rire lui échappa alors, ses épaules bougeant légèrement et il hocha le visage. « Une sacré coïncidence oui », dit-il doucement, riant encore un peu et regardant pleinement la chienne. « C'est un surnom assez mignon cela dit », il redressa son regard vers elle dans un autre sourire.

Clignant quelque peu des paupières, il la regarda faire, observant Bambi dans un petit sourire. Un petit « Hum ? » roula dans sa gorge, les pupilles à nouveau sur la jeune femme, un air totalement perturbé au visage. « Ah oui ? », demanda-t-il, la tête se basculant à nouveau. « Oh non c'est pas idiot », s'affola-t-il doucement, ne voulant pas qu'elle s'excuse pour ça. « Faut pas t'en faire, d'accord ? », il lui offrit un léger sourire rassurant, les pommettes rosies, un peu gêné. « Et puis c'est... », et il s'arrêta dans sa phrase parce qu'un enfant venait de passer pas loin, une main tenant celle de sa mère et l'autre s'agitant énergiquement pour saluer un peu tout le monde. Dans un sourire amusé, Dean le salua, riant quelque peu, avant de retourner son attention sur sa vis-à-vis. Il cligna des yeux, penaud. « Hum... on parlait de quoi ? », c'était tout Dean ça, le distraction en personne. « Ah oui ! Je m'appelle Dean, ravi de te connaître », et il fronça faiblement les sourcils parce que... il parlait pas de ça, pas vrai ?
Et tiens.. maintenant qu'il la regardait à nouveau, elle semblait familière. C'était peut-être une impression ?

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Même s’il essayait de se montrer compréhensif en assurant que ce n’était pas idiot, la jeune femme ne pouvait que se sentir idiote face à son propre comportement. Il semblait évident qu’elle ne mangeait pas de feuilles et qu’il s’était adresser à une toute autre personne. En l’occurrence son adorable petit animal. Quelle coïncidence ! Un sourire plus grand encore tira les lèvres de Dambi alors qu’elle approuvait d’un hochement de tête les propos du garçon. « En effet, c’est un joli surnom. Je ne peux qu’approuver le nom de cet adorable créature. » Non pas seulement parce qu’on la surnommait ainsi, mais parce que cela sonnait doux à l’oreille. Certainement aussi parce que cela faisait référence au petit faon de Disney, rappelant immédiatement à de nombreuses personnes leur douce enfance. D’autres paroles traversèrent les lèvres de la lycéenne alors qu’elle l’appelait Oppa, nouvelle action idiote de sa part, amenant de nouvelle paroles rassurantes. C’était la journée de l’idiotie ! « D’accord. » dit-elle tout bas, si bas qu’elle se demanda s’il l’avait entendu. Pourtant elle s’en faisait, ne serait-ce qu’un peu, parce qu’elle ne voulait pas l’embêter dans sa promenade et qu’elle continuait à lui parler. Mais c’était plus fort qu’elle : Dambi voulait savoir.

L’homme face à elle se perdit un moment dans ses pensées, si bien qu’elle se demanda si elle n’allait pas partir pour le laisser profiter de sa douce promenade avec son petit animal. Il salua un enfant non loin avant de recentrer son attention sur l’adolescente, riant et clignant des paupières. Sa distraction ne faisait qu’appuyer le sentiments dans son cœur qu’ils se connaissaient déjà. Cela semblait être des années plus tôt, si loin que cela ressemblait davantage à un rêve. Alors il se présente, fronçant ensuite les sourcils, et un éclair passa dans les pupilles de Dambi. C’était lui. C’était bien son Oppa. Il n’avait pas tant changé, mais elle devait être devenue bien différente. « Oui ! C’est toi ! » La brune frappa dans ses mains en riant. Dambi n’écoutait que peu de personnes à présent, elle n’était plus la gentille petite fille obéissante qu’elle fut par le passé. Seuls les mots de Luka avaient un réel impact sur elle, et peut-être certains prononcés par Iryon. Dean était ce garçon qu’elle avait toujours regardé avec de grand yeux, comme un grand frère adorable qui s’occupait d’elle lorsqu’il passait au hanok avec sa grand-mère. Elle reprit rapidement constance. « Pardon. Enchantée Dean. Mais… On se connaît déjà. Tu n’as pas tant changé, mais moi oui. Je suis Koo Dambi. » Un haussement d’épaules souligna ses paroles. Ils n’étaient que de tout petits enfants à cette époque.

L’adolescente avait envie de lui dire tout un tas de choses, mais elle ne savait plus par où commencer. Aussi, elle tria les idées dans son esprit en débutant par ce qui lui semblait être le plus simple. « Tu es parti pendant si longtemps… Ta grand-mère a beaucoup parlé de toi à la mienne. Mais… Je ne savais pas que tu étais de retour. » Un sentiments commença à grandir en elle : la peur de le décevoir. De décevoir cet Oppa si gentil avec elle en le laissant découvrir qu’elle n’était plus l’adorable enfant qui jouait avec lui. Qu’à présent, c’était une fille qui buvait et sortait dans les bar, les boites de nuits. Qu’il lui arrivait de voler, d’enfreindre les règles et de se retrouver au commissariat. Tout ça pour attirer l’attention de son paternel. Mais elle ne montra rien, gardant un visage doux et souriant. « Désolée. Je n’arrête pas de t’embêter avec mes bêtises… Tu ne te souviens même pas de moi. Nos grand-mères sont de très vieilles amies, tu sais. » Elle posa une main sur ses lèvres avant d’ajouter. « Bambi doit surement continuer sa promenade, mais peut-être que l’on pourrait se revoir, lorsque tu auras plus de temps libre. » La jeune fille se montrait douce et gentille, même si elle n’était plus exactement ainsi. Comment la blâmer ? Tant de temps s’était écoulé depuis leur enfance. Et tant de choses avaient changées…

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« Oh », souffla-t-il, le sourire contenté, comme si la demoiselle venait de complimenter le prénom de son enfant – Bambi était un peu son enfant en soit... alors ça fonctionnait non ? Il secoua doucement son visage dans une bouille attendrie face à la boule de poils, parce que c'était vrai, ce nom était adorable et la « créature » l'était tout autant. Un peu surexcitée quand il y avait des feuilles qui traînaient dans les parages, mais adorable quand même. Sans s'en rendre compte il répondit à la jeune femme, lâchant ce faible son comme s'il s'agissait de la meilleure réponse qu'il puisse formuler. Qu'elle n'ait rien à craindre cependant, Dean ne lui en voulait pas. Ce « Oppa » lui avait probablement échappé, tout comme la réponse directe de Dean. Il lui offrit un petit sourire, tentant de la rassurer encore une fois, bien qu'il ne soit pas sûr d'y parvenir. Et même s'il était quelqu'un de réservé, Dean n'avait rien contre les petites conversations de ce genre. Bien souvent, il laissait des blancs gênants, mais le temps que l'on continuait à lui faire la conversation il supposait que ce n'était pas trop problématique. Enfin ce n'était pas ses silences qui étaient réellement embarrassant mais plutôt cette façon qu'il avait d'afficher son taux de concentration... il avait celui d'une mouche, et encore, une mouche restait plus longtemps posée sur le meuble de la télé que Dean sur une seule et même pensée – ou un seul et même geste, peu importait. C'était sans doute son trait de caractère le plus poussé, le plus cliché et le plus agaçant. Quoi que... « Oui c'est moi ? », il cligna des paupières, penaud. Bien sûr que c'était lui, qui d'autre ? Il continua de l'observer, quelque peu perturbé, les prunelles voyageant autour de lui comme s'il tentait de trouver la réponse dans les nuages – dommage ça ne marchait pas. « On se connaît déjà ? J'ai pas changé ? », et il était devenu quoi, un perroquet ? « Oh », lâcha-t-il, les sourcils relevés sous la surprise à l'entente de ce nom. Sa bouche s'ouvrit dans une sorte de petit « o » avant qu'il ne se mette à sourire tendrement, le regard doux, reconnaissant. Il la détailla quelque peu, se rendant compte à quel point elle avait changé – lui non apparemment. C'était un compliment au moins ?

« Ah », il émit un léger rire, embêté. « J'aurais dû prévenir, je suis désolé », il bascula quelque peu son visage sur le côté. Il n'y avait pas pensé, à dire vrai. « Je me souviens, je me souviens », dit-il en tapotant légèrement son front. Dambi... comment oublier cette gamine adorablement mignonne ? « Je suis vieux mais pas au point d'avoir tout oublié », il rit quelque peu et secoua son visage. « Mais oui, ça fait longtemps. Tu as bien grandi en tout cas », il lui réserva un autre sourire. « Bambi ? Ah oh Bambi », il se tourna vers la chienne dans un air presque affolé – c'était trop lui demander de se concentrer sur trois choses en même temps : Dambi, Bambi et respirer. « Elle est occupée avec les feuilles », il grimaça quelque peu, « Ca peut la tenir occupée pendant des heures », il haussa les épaules. Ca pouvait le tenir occupé pendant des heures aussi de juste la regarder. « Comment tu vas ? », il reposa son attention sur elle, « Tu allais quelque part ? Je veux dire, je vais pas te retenir avec mes questions. On peut se voir une autre fois et discuter de ... », il s'arrêta un instant et fit un geste vague avec ses doigts comme s'il cherchait à désigner quelque chose sans vraiment le faire. « De tout ? Je suppose », il eut un bref mouvement d'épaules dans un léger son amusé. « Te roule pas dans les feuilles Dam... non... Bambi », à une lettre près...

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La mémoire de la jeune fille était infaillible, contrairement à l’attention de son interlocuteur qui laissait ses yeux papillonner ça et là. Dambi trouvait cela plus attendrissant qu’énervant, appuyant d’autant plus la certitude qu’elle avait de déjà le connaître. Ce Oppa de son enfance qui, lui aussi, avait tendance à se perdre dans ses pensées pour oublier même de quoi ils parlaient. L’adolescente se souvient encore de leurs jeux, et du temps qu’elle passait à compter contre un muret pour le retrouver à jouer avec des papillons, oubliant même qu’ils jouaient à cache-cache au départ. Un sourire attendrit se dessina sur ses lèvres alors, qu’à son tour, il se souvenait enfin d’elle. Dean tapota son front, lui offrit un rire et des sourires. En effet, elle avait bien grandit et bien changée. Elle ne savait pas si c’était réellement dû à ses traits ou simplement à ses cheveux et sa tenue. Quoiqu’il en soit, il affirmait une chose qu’elle savait déjà : ce n’était plus la même petite fille avec qui il avait eu l’habitude de jouer. Alors qu’elle allait lui répondre, il concentra à nouveau l’attention sur le petit animal qui s’amusait avec les feuilles. « Moi aussi. » dit-elle en riant. Les feuilles pouvait la tenir occupée pendant des heures entières, mais plus sous leur aspect scientifique. Pas simplement pour jouer avec elles.

La jeune fille récupéra son attention, affirmant d’un hochement de tête de son état. Elle se portait bien. Même si cette histoire de fiancé lui pesait sur les épaules, elle savait que ce n’était pas le genre de discussion que l’on a en venant seulement de revoir une personne perdue de vue depuis si longtemps. Du moins, pas de suite. « Non. Je n’allais nulle part. Je… » Son animal récupéra alors toute son attention, et lorsqu’il se trompa un fou rire s’empara de l’adolescente. A une lettre près. Mais elle ne lui en voulait pas le moins du monde. C’était relativement simple de se tromper entre les deux prénoms. Elle-même aurait pu faire cette erreur. « C’est qu’elle en a de l’énergie cette petite bête. » La brune s’agenouilla pour être à hauteur de l’animal, celui-ci courant alors immédiatement vers elle lorsqu’elle entreprit de secouer une feuille en l’air. C’est vrai que cet animal était une pile d’énergie qui avait très certainement besoin de continuer sa promenade. Dambi relava ses yeux sur Dean. « J’étais en train de construire un herbier avec les dernières feuilles d’automne. Je fais ça chaque année. » Parce que c’était sa plus grande passion, la botanique. Même si son père voulait qu’elle aille en droit et marche dans ses pas. Dambi ne rêvait pas de cette vie.

Bambi continuait à jouer avec la feuille que l’adolescente secouait juste au-dessus de son museau. L’animal était absolument adorable. Elle se souvient alors de ce petit lapin qu’elle rêvait d’offrir à Mina, et qu’elles nommeraient surement Panpan en l’honneur de ce petit lapin de chez Disney. Bambi et Panpan. C’était drôle. Peut-être que ce petit chien finirait par s’entendre avec le lapin. « Il faudra que tu passes à la maison. Maman et grand-mère seront heureuses de te voir. Et Mina aussi. Surtout Mina. » Car il ne pouvait pas l’ignorer. Dambi n’avait que sept ans lorsque cette fille est devenue, d’une certaine manière, sa dame de compagnie. Son père était devenu le tuteur légal de cette petite orpheline dans le seul but de ne pas laisser l’héritière Koo seule au Hanok, sans compagnie, recroquevillée sur elle-même suite à la mort de son grand-père. Mina. Celle qui était devenue avec le temps sa meilleure amie et sa plus grande alliée. La lycéenne laissa la feuille retomber au sol, se relevant et laissant en même temps Bambi retourner à ses occupations. « Je ne vais pas te déranger plus longtemps. Bambi semble s’impatienter et j’ai un herbier à terminer. » La jeune fille secoua le petit carnet pour appuyer ses paroles. A cause du petit animal, toutes ses feuilles étaient tombées et il lui fallait recommencer sa quête. Mais pour Dean, cela en valait le coup. « Prends mon numéro et passe quand tu veux. Tu seras toujours le bienvenue. » Et, pour souligner ses mots, elle arracha une feuille de son cahier pour y inscrire son numéro de téléphone et le donner au jeune homme. Son sourire était grand et on pouvait y lire la joie de l’avoir retrouvé. Son cher Oppa du passé.

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Mais n'était-ce pas trop tard, finalement ? Aurait-il dû partir plus tôt ? S'ils étaient partis plus tôt, son père serait encore là. Probablement. Ce n'était qu'une hypothèse, une idée qui allait et venait dans son esprit. Une idée qui se plantait, qui germait, qui fleurissait, qui grandissait. Une idée qui fanait, qui mourait, qui retournait à la terre, qui redevenait poussière. C'était une pensée qu'il se gardait bien de dire à voix haute. Une pensée qu'il gardait uniquement pour lui. Il ne voulait pas culpabiliser sa mère. Il ne voulait pas l'attrister non plus, en émettant l'idée que s'ils étaient venus ici depuis le début, son père n'aurait pas disparu. Cela ne le ramènerait malheureusement pas de le dire – sinon il l'aurait hurlé depuis bien longtemps déjà. Cela ne changerait rien, à part accabler un peu plus sa mère, ou ses grands-parents. Il pouvait s'accabler tout seul. Il pouvait continuer d'y penser. Personne n'était en faute à part, et personne n'était malheureux à cause de lui. Il était le seul à y penser, à y réfléchir et à tourner autour de l'idée. Il était seul à se demander si tout quelque chose aurait été différent, le seul à imaginer comment tout aurait été différent. Mais il était trop tard, à présent. Il avait été « trop tard » depuis bien longtemps déjà.
Cependant, il n'était pas « trop tard » pour renouer avec des personnes du passé. Il n'était jamais trop tard pour ça, n'est-ce pas ? Et si Dambi se présentait devant lui aujourd'hui, il s'agissait là d'un indice pour qu'il songe ainsi. Il n'était pas trop tard pour la retrouver, pour la connaître à nouveau.

Une moue gênée s'empara de son image, bien que le sourire qui étirait ses lèvres était plutôt satisfait de l'entendre rire. « Oh oui, beaucoup », qu'il commenta en riant à son tour. Surtout qu'il y avait des feuilles et que cela semblait l'occuper. Cela semblait lui donner un peu trop d'énergie aussi – étrange, vu qu'elle courait partout. Une moue attendrie prit place sur son visage alors qu'il les observait, souriant ou riant en fonction des mouvements de la jeune femme et du canidé. C'était adorable, comme scène. Clignant des paupières, il observa la jeune femme, l'air penaud. L'air perdu. L'air totalement dépassé par son temps. Elle faisait un quoi ? « Tu construis quoi ? », demanda-t-il, les sourcils froncés. « Un herbier ? C'est quoi ? », il bascula son visage sur le côté, ne comprenant pas réellement de quoi elle parlait. A partir du moment où parlait un peu trop de plantes, on le perdait de toute façon. On le perdait tout le temps, Dean. Il se frotta la joue, embarrassé de ne pas savoir, de ne pas comprendre.
Ses sourcils se relevèrent dans un petit surpris, un large sourire se dessinant sur sa bouche dans la seconde suivante. « Volontiers. Ca me ferait plaisir de les revoir aussi », dit-il, gardant une esquisse timide mais tendre aux lèvres. « Elles vont bien ? Tu penses qu'elles se souviendront de moi ? », il pensait ne pas trop marquer les esprits, Dean. Et ça faisait longtemps. Alors il pouvait comprendre si on l'avait oublié depuis le temps. « Tu leur passeras le bonjour », lui assura-t-il dans une voix douce, « Et tu pourras leur dire que je viendrai les voir prochainement », il hocha son visage à plusieurs reprises comme pour appuyer ses mots et les ancrer un peu plus dans le présent. Un léger rire roula dans sa gorge. « Tu ne me déranges pas. C'est plutôt qui te dérange, tu étais occupée », il inclina quelque peu son visage. « Et Bambi doit rentrer. Elle va être épuisée, elle va faire que dormir », il rit quelque peu quand la chienne se mit à tourner sur elle-même, avant de s'asseoir soudainement comme si elle confirmait ses paroles. Il sourit et secoua son visage, approbatif. « Avec plaisir », il attrapa doucement le papier qu'elle lui tendit, la moue satisfaite. « Je te contacte prochainement alors et je passerai te voir », le coin des lèvres levé, il la regarda, le regard pétillant, heureux de l'avoir retrouvé. « Prends soin de toi jusque là d'accord ? », il s'inclina légèrement, et se baissa pour récupérer Bambi dans ses bras – la pauvre chienne semblait le remercier. « A bientôt », qu'il lui dit, agitant doucement sa main, s'éloignant lentement. Il jeta des regards en arrière de temps à autres, gardant une fine esquisse aux lèvres alors que ses pupilles détaillent le bout de papier.