un fil rouge invisible relie, indépendamment du temps, de l'endroit ou des circonstances, ceux destinés à se rencontrer. ce fil s'étire, s'emmêle, mais jamais ne rompt.
–  légende chinoise

il y a des choses encore difficiles à assimiler. ces événements étranges, survenus plus tôt dans la semaine... pourquoi ? qui ou quoi les a déclenchés ? cette île est bizarre. cette île est instable. la blonde regrette presque, déjà, d'y avoir mis les voiles. elle voulait repartir sur de bonnes bases, voir son cadet s'épanouir dans un nouvel environnement, plus saint qu'avant. a-t-elle fait le bon choix ? elle ne sait plus. elle ne l'a peut-être, même, jamais vraiment sue.

il y a des choses encore difficiles à assimiler. pour cause de choc, ou autre. il y a des choses difficiles à assimiler, mais, pour ce coup-là, da in ne pense pas avoir rêvé. c'est bien elle qu'elle a vu arrêté par les autorités lorsque tout commençait à se calmer. elle en est presque sûre. elle la reconnaîtrait entre mille. mais c'est si improbable. elle ? ici ? aux dernières nouvelles, la belle brune n'a jamais quitté busan. mais, dans un sens... à quand remontent les dernières nouvelles ?...

piquée de curiosité et de soif de savoir la vérité, l'étudiante en art s'est rendu à la gendarmerie. bonjour, excusez-moi... est-ce qu'une femme brune,  teint un peu hâlé, étrangère, est ici ? on lui a répondu que oui, mais, plus maintenant. "elle se trouve à l’hôpital, vous devriez chercher là-bas". un merci, puis, elle s'en va. elle n'a pas de temps à perdre. elle veut en avoir le cœur net. *est-ce vraiment toi ?...*

c'est d'un pas rapide, déterminé, qu'elle s'engage en direction du centre hospitalier. focalisée sur son objectif, elle en oublie des détails importants. regarder avant de traverser, s'excuser lorsqu'elle vient malencontreusement bousculer... le klaxonne lui fait grincer des dents, sonnée par le son elle se penche brièvement en signe de pardon, une main plaquée contre le front. comme si cela pouvait faire quoi que ce soit contre une subite douleur.

arrivée à destination, la blonde ne prend pas la peine de respecter la fil d'attente, sous le plus grand mécontentement des gens. *roh, ça va. c'est juste le temps de demander un renseignement, ça prend deux secondes.* nom et prénom de la présumée patiente donnés, la secrétaire vérifie rapidement ses registres avant de prononcer un numéro de chambre. il n'y a plus de doutes, désormais... *c'est bien toi, mais, qu'est-ce que tu fais là...*

da in grimpe les escaliers, arpente les couloirs, et termine devant la porte numérotée. elle stresse subitement. elle en a des palpitations au bout des doigts.
une grande inspiration, et la voilà qui prend son courage à deux mains. trois petits coups avant d'entrer. à sa vue, son cœur rate un battement. une lueur de bonheur brille dans ses yeux. sans un bonjour, elle s'approche de sa vieille amie, l'enlaçant dans ses bras, sans se soucier du temps les ayant séparés. pyô...

Un mal de crâne intense, l'obscurité total, des cris. Voilà les seuls souvenirs que j'ai depuis deux jours passé. Je ne me souviens de rien d'autres. Tout se déroulait le plus normalement possible pendant mon rendez-vous avec ma patiente. Puis, plus rien. Le néant, le trou noir. Et cela me frustre énormément, il n'y a rien de pire que d'ignorer ce qu'il m'est arrivé et de me retrouver à l'hôpital pour des examens. Même les médecins semblent confus par rapport à ce qu'il m'est arrivé. Le diagnostic principal est une perte de mémoire inexpliquée. Les médecins n'arrivent pas à expliquer mon comportement violent, la police non plus. J'ai cru à une mauvaise blague au début, lorsque l'agent de police m'a relaté les fait et m'a montré des témoignages. Puis lorsque j'ai vu les vidéos, j'ai compris que quelque chose d'étrange s'était déroulé. Il n'y a aucunes explications scientifique possible concernant ces images. Du moins pas à ma connaissance. 

J'ai longuement tourné dans mon lit, essayant de récupérer des souvenirs, me concentrant pour tenter de résoudre ce mystère. Mais rien à faire. Rien ne me revient absolument rien. J'aimerai savoir ce qu'il m'est arrivé et pourquoi d'un coup j'ai décidé de casser tout le mobilier de mon cabinet. Et je suis obligée de rester à l'hôpital encore deux jours, pour "observations". Je ne peux m'empêcher de penser à mon cabinet, j'espère seulement que les dégâts ne sont pas trop important. Après 1h à tourner en rond et à zapper les chaînes à la télé, j'ai décidé de me lever pour observer un peu le paysage par la fenêtre, quand la porte de ma chambre s'ouvrit, je me retourna, m'attendant à voir un médecin entrer. C'est un autre visage que j'aperçu, bien plus familier que tous ceux que j'ai croisé ici. Da In… ? Sa voix résonna et mon nom sur ses lèvres me prit de cours. Que fait elle ici ? Tout un tas de questions s'encombrent dans mon esprit mais je ne mis pas très long pour marcher jusqu'à elle et la prendre dans mes bras. Da In mon amie, ma plus que bonne amie. Celle que j'ai tant aimé et celle dont j'ai le moins aimé quitter de Busan. Qu'est ce que tu fais ici… ? Je… je ne m'y attendais pas ! Les larmes montent rapidement à mes yeux. Après être partit de Busan, je n'avais pas réellement prévenu Da In, ni qui que ce soit. Lui demander ce qu'elle fait ici est presque ironique, car je ne lui ai pas dis que je déménageais. Je ne lui ai rien dis. Et pourtant j'étais proche avec elle. J'aurai surement du mais, j'avais trop peur. J'avais trop peur qu'il me retrouve, je voulais uniquement fuir et partir le plus loin possible. Je suis désolée Da In… je ne t'ai pas prévenu… La seule chose qui sort de ma bouche est une excuse, une plate excuse pour avoir fuit une ville sans prévenir son amie. Mais Da In m'a trop manqué alors, c'est également des larmes qui coulent le long de mes joues, tandis que je l'enlace dans mes bras.

la surprise tord son doux visage halé. compréhensible, il faut dire que dain ne lui a pas laissé le temps de réaliser. elle n'en a pas eu le temps elle-même, en réalité.  cette île est bizarre. cette île est instable. mais, cette île fait également des miracles. car, la blonde ne pouvait pas rêver mieux que la retrouver. pyô. ce surnom ne quitte pas ses lèvres, comme si le répéter aller l'aider à confirmer que leurs retrouvailles sont vraies. elles le sont. pas de doute. mais, au cas où, la plus jeune s'enlace son aînée comme un coquillage accroché à son rocher. la japonaise ne va pas lui échapper. elle ne va plus lui échapper.

qu'est-ce que j'fais ici ? c'est l’hôpital qui s'fout de la charité ! toi, qu'est-ce que tu fiches ici, hm ? un regard exagérément (mais surtout faussement) vexé, laissant sous-entendre que la blonde n'a pas vraiment apprécié le soudain silence radio de la part de cette amie adorée. nan, plus sérieusement... plus ou moins une longue histoire, mais, daeho et moi on vit ici maintenant. j't'avais déjà dit que nos grands-parents vivent à jeju, non ? on loge chez eux depuis pas très longtemps. mi-janvier, un truc du genre. tu sais... à peu près à cette période où t'as commencé à faire l'autruche. et un second regard lourd de sens, rapidement alléger par un rire. allez, j'arrête de t'embêter avec ça ! mais bon... la prochaine fois que tu joues les mortes, préviens moi. j'me posais des questions à ton sujet. j'croyais même que c'était ma faute si tu ne me parlais plus...kyô lui dira peut-être qu'il n'y a pas de raisons, qu'elle ne devrait pas penser ça. mais, à ses yeux, il y a mille et une raisons de ne plus vouloir lui parler. son caractère, son franc parlé, son côté un peu trop fouineur, un peu trop sur le dos de ceux qu'elle aime. et dieu sait à quel point elle l'aime. à qu'elle point, à une époque, elle l'aimait trop. autant que daeho. mais pas dans le sens "my bro".

dans sa grande tirade d'enquiquineuse, dain n'a pas fait attention aux larmes qui montent aux yeux de la brune. et, lorsqu'elle s'en rend compte suite aux excuses de kyô, un élan de panique la prend. eeeeh ? kyunnie tu... eh non hein ! tu pleures pas ! si tu pleures je pleure. et tu sais ce que je dis toujours : y'a que les femmelettes qui pleurent. on est des bonhommes oui ou non ? l'étudiante en art se mord la lèvre inférieure. elle n'aime pas du tout voir ses proches pleurer. elle se sent toujours super nulle et inutile, parce qu'elle ne sait pas quoi faire pour les apaiser. alors, c'est dans une tentative maladroite qu'elle vient chasser les larmes de la nippone d'un revers de la manche. allez, pleure pas s'il te plaît... t'es quand même plus jolie quand tu souris, tu crois pas ? heureusement que t'as pas de mascara, tes joues ressembleraient à des coulées de boue sinon. c'est pas très sexy.

laissant le temps à la brune de se calmer, une main caressant son dos comme elle l'a toujours fait en guise de soutien, elle finit par enchaîner. le monde est petit, quand même. ou alors on est lié par le destin. ou les deux. j'sais pas mais en tout cas si on m'avait dit que je te croiserai sur cette île, emmenée par des flics, j'y aurais pas cru. et d'ailleurs... qu'est-ce que tu foutais avec les flics ? t'as perdu la boule comme les autres habitants ? c'était flippant... j'ai pas compris ce qu'il s'est passé, au début de la semaine. toute la ville a eu un grain de folie, puis, le retour du calme plat. comme ça. sans transition.

se craquant la nuque, dain soupire en se frottant l'arrière du crâne, un peu gênée. j'parle beaucoup, non ? excuse-moi. je suis juste... j'suis vraiment contente de te voir. un sourire idiot se peint sur son visage. elle dit pas souvent qu'elle tient aux gens de façon claire. et pourtant, elle ne fait que ça là. puis du coup je blablate, je blablate, mais je sais même pas quel bon vent t’amène par ici. t'es en vacances en mode soleil des tropiques avec ton copain ? il en a de la veine ! moi aussi je veux qu'on m'emmène en week-end romantique sur une île. super goal.

C'est bien elle, c'est bien mon amie en chair et en os. Da In. Complètement surprise de cette retrouvaille et encore chamboulée par les récents événements, c'est dans ses bras que je fond en larme. Je suis heureuse de la revoir mais en même temps, j'ai honte. Honte d'être partie de Busan sans l'avoir prévenu. Alors qu'elle est l'amie la plus proche que j'ai. Celle sur qui je comptais, celle à qui je racontais toute ma vie, elle avec qui j'ai tant rigolé, tant traversé. J'aurai du la prévenir, même si je n'en avais pas la force ni le cœur, ça aurait été la moindre des choses. Même dans les larmes elle réussit à me faire rire. Alors, je glousse doucement essuyant mes larmes. Elle n'a pas changé, elle est toujours aussi rentre dedans. Tu as raison… c'est l'hôpital qui se fout de la charité ! Et je m'écarte légèrement, brisant notre étreinte afin de mieux la regarder. Elle m'explique les raisons de sa présence sur l'île, j'hoche la tête tout en essuyant les dernières larmes qui coulaient sur mon visage. Oui tu m'avais dis que tu avais de la famille sur l'île, je m'en souviens. C'est chouette pour vous alors ! Je marque une petite pause, remarquant l'inquiétude de Da In. Elle doit se poser un millier de questions à l'heure actuelle. Je sais et je suis désolée mais, je n'avais pas la force d'en parler honnêtement. J'ai préféré fuir, c'est très lâche je sais. Mais ce n'est pas de ta faute ! Je suis vraiment désolée que tu ai ressenti ça Da In. Un petit sourire se dessine sur mes lèvres. Je caresse tendrement les bras de mon amie, comme pour lui faire comprendre que je suis sincère. Je sais qu'elle comprendra, elle a toujours été de mon côté, elle m'a toujours soutenu. Plus je la regarde plus je me demande pourquoi je ne lui en avait pas parlé à ce moment là. J'aurai dû, qui sait elle aurait pu m'aider à surmonter cette épreuve. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé honnêtement… je n'ai aucun souvenir mais oui la police m'a arrêté, apparemment j'ai été violente et j'ai cassé des choses dans mon cabinet. C'est assez bizarre ce qu'il se passe sur cette île…

C'est avec le sourire que j'écoute Da In parler ou plutôt, blablater. Son débit de parole m'a manqué, on a des choses à se dire alors, c'est avec plaisir que je laisse son côté bavard reprendre le dessus. Je l'écoute attentivement toujours souriante. Ne t'en fais pas, je suis aussi très heureuse de te revoir, tu m'as manqué ! Mais lorsqu'elle a finit de parler, mon sourire s'efface. Il est remplacé par un air triste, une douleur qui refait surface. Je me crispe lorsque je l'entends faire référence à mon copain. Et je déglutis avant de reprendre la parole, réfléchissant à mes mots. Je lui doit bien la vérité. À vrai dire je ne suis plus avec mon copain et je ne suis pas non plus en vacances sous les tropiques. Marquant une pause, je prends une grande inspiration pour continuer mon récit. J'ai déménagé et je suis arrivée à Jeju mi-Janvier, à peu près en même temps que toi. Et si j'ai fais l'autruche c'est parce que… parce que ça s'est très mal terminé avec mon ex. J'ai déménagé pour le fuir. Alors, j'ai voulu quitter Jeju le plus discrètement possible. En parler et repenser à Sung-Jae est presque une torture. Dès que je pense à lui je me crispe complètement. C'en est presque une torture. Mon copain m'a trompé et… j'ai découvert sa véritable personnalité. Il m'avait manipulé depuis le début. Et lorsque j'ai mis un terme à notre relation, il s'est encore plus accroché. Il était persuadé de me posséder. Alors, j'ai préféré fuir tellement j'avais eu peur. Ma voix devient tremblante, j'évite de regarder Da In dans les yeux, comme pour éviter de lui montrer à quel point je suis brisée. Être ici me permet de recommencer à zéro, j'essaie de l'oublier mais c'est très difficile. Le pire dans tout ça c'est que je le déteste mais, je suis encore amoureuse de lui… c'est horrible. Les larmes coulent de nouveau et cette fois-ci je regarde Da In. Je ne peux plus me cacher. J'aurai du t'en parler je sais mais, il aurait été capable de te faire du mal, je voulais à tout prix éviter ça… La douleur revient rien que d'imaginer Da In blessée par Sung Jae. S'il lui avait fait du mal, jamais je ne me le serai pardonnée. Je ne suis toujours pas remise de ce qu'il m'a fait subir. C'est de nouveau dans les bras de Da In que je fond en larme.

dain n'a jamais fait dans la dentelle, que ce soit par ses mots ou par ses actes. ça à le don de plaire ou de paraître exécrable. mais, ça, kyô y est habituée. elle a toujours fait avec et, sans que la blonde ne veuille s'en vanter : ça a toujours plutôt bien fonctionné. la preuve en est ! la japonaise a fini par esquisser un sourire et à même cessé de pleurer. son côté abrutie heureuse, dain l'assume pleinement et en est fière. grâce à ces manies de prises à la légère et clowneries, elle a la capacité de consoler ses amis. et c'est probablement la chose qu'elle préfère le plus faire. kyô, elle la connait depuis des années. kyô, elle l'a vu plusieurs fois pleurer. kyô, elle s'est toujours mis en tête de devoir la protéger. quand bien même elle est plus jeune, plus petite, moins futée. kyô, c'est comme daeho : y toucher, c'est jouer avec le feu avec la garantie d'en sortir brûlé. tu vois ? t'es quand même vachement mieux avec le sourire. les larmes ça va qu'aux nanas dans les films, toujours classes et distinguées. petit commentaire à la fois taquin et sincère. comme pour s'assurer de l'arrivée d'un nouveau rire, par crainte d'un nouveau sanglot. haussant les épaules, elle ricane tout en exagérant son geste de décoiffage, surjouant la fille trop sûre d'elle. bien sûr que j'ai raison ! j'ai toujours raison. un petit clin d’œil malicieux, puis, dain retrouve un minimum de sérieux en écoutant son aînée. une moue lui échappe, étrange mélange entre tristesse et inquiétude. attristée par le fait que l'étudiante en art n'aime pas voir la brune culpabiliser et inquiétée par certains mots. "je n'avais pas la force d'en parler". ça sonne si grave. si important. l'envie de demander ce qu'il s'est passé, parce qu'il s'est visiblement passé quelque chose, est forte. mais, dain a l'impression qu'elle a déjà trop pausé de questions. alors, elle se mord la langue et se retient de parler. t'excuses pas. t'es d'jà toute pardonnée avec moi, tu l'sais bien : je sais pas t'en vouloir plus de trente secondes. son regard se porte sur les caresses de son amie et dain se retrouve bêtement, comme à son habitude, à sentir son cœur s'emballer. vraiment... elle et les contacts physiques avec les filles... ses battements accélérés et palpitations finiront par la tuer. en attendant, madame continue à nier. s'éclaircissant la gorge, comme si cela allait balayer sa gêne, dain profite des paroles de la brune pour rebondir dessus et contourner son malaise en lâchant un petit rire. toi ? violente ? eh bah ! elle est où la p'tite kyô sage que j'connais ?

pour ne rien cacher, dain est rassurée. rassurée de voir que même si elles se sont un peu perdues de vue, rien n'a changé. elles ont toujours cette discussion facile, cette bonne ambiance et bonne humeur. parfois, la blonde a l'impression que leur relation n'a jamais bougé depuis toutes ses années. leur lien est toujours aussi fort et passionné que le premier jour où elles se sont abordées. l'étudiante a toujours eu un côté méfiant sur la durabilité des amitiés. les gens entrent et sortent de vos vies comme dans un moulin. mais, kyô... elle aime espérer et penser que kyô et elle, c'est pour encore une paire d'années.

en écoutant la nippone, le grand sourire de dain s'estompe. son visage devenant grave, comme après une gifle, un grand coup de fouet. elle ne sait pas où se mettre suite à ce qu'elle vient d'entendre. elle se sent bête, horriblement bête. elle s'est lancée sur un sujet comparable à un terrain boueux. elle aurait probablement mieux fait de tourner plusieurs fois sa langue dans sa bouche avant de parler. se triturant nerveusement les mains, la blonde n'ose pas en placer une, écoutant simplement sa camarade, différentes émotions lui montant à la gorge. empathie, tristesse, sentiment d'impuissance parce qu'elle n'a rien vu et n'a rien fait, colère et profonde envie d'aller refaire le portrait de sungjae. le terme "amoureuse" la fait tiquer. dain aurait aimé la rassurer en disant qu'elle comprend et que c'est bizarre, mais, normal de garder des sentiments pour quelqu'un que l'on vient de quitter ou qui vient de nous plaquer. mais, c'était sans compter que par expérience dain ne peut pas véritablement prétendre comprendre. après tout, qu'a-t-elle eu dans sa vie ? deux ? trois copains ? la plus longue de ses relations ayant duré six mois ? huit, en étant généreux ? quelques mois passés à se forcer, à faire semblant, à espérer que ses préférences pour les filles ne sont que de passage, qu'une drôle d'impression. comment pourrait elle sincèrement prétendre comprendre la douleur de son amie si elle n'a jamais ressenti aucun regret à quitter ses ex ? aucun, puisqu'elle ne les avait au final aimés qu'en tant qu'amis. la seule fois où elle s'est sentimentalement senti souffrir et triste, c'est lorsque la fille pour qui elle s'était éprise lui a annoncé être en couple. et comment pourrait elle parler de ça à kyô ? cette dernière ne savant même pas la sexualité de sa meilleure amie qui prend soin de la refouler depuis le début du lycée. cette dernière étant la fille en question, la seule réelle peine de cœur de dain, peine dont elle n'a jamais parlé.

évitant de ressasser le passé et ré-ouvrir cette petite plaie, dain prend une grande inspiration avant de souffler et accueillir tendrement kyô dans ses bras. au début, elle ne sait pas trop quoi faire pour tenter de l'apaiser. mais, les gestes délicats finissent par se faire comme un automatisme. une main vient doucement se frotter dans le dos de son aînée, pour tenter d'apaiser sa respiration et ses sanglots, et dain vient caler son visage contre son crâne, le nez niché dans ses cheveux où elle dépose maladroitement un baiser, comme l'aurait fait une mère avec son bébé. ça va aller, ok ?... il va plus rien t'arriver. t'es en sécurité ici, il sait pas que t'es là et il risque pas de t'trouver. fronçant légèrement les sourcils, elle ajoute plus sèchement, comme si elle s'adressait directement à l'homme qui met la brune dans tous ses états. 'façon crois moi que j'l'éclate s'il t'approche à moins de vingt mètres. suite à cela, un instant de silence s'installe. instant où seuls les pleurs de kyô se font entendre. elles restent blotties l'une contre l'autre, sans un mot pendant un long moment. jusqu'à ce que dain propose avec hésitation : tu veux qu'j'aille chercher quelque chose à la cafétariat du rez-de-chaussée ? à boire ou à manger, ça va p'têtre te faire du bien ?

La confession achevée, c'est dans les yeux que j'observe mon amie. Mes pupilles ancrées dans les siennes, signalant comme la détresse que je ressens en moi. C'est la première fois que je me confesse sincèrement à propose de ma rupture. C'est dur à avouer mais c'est soulageant d'une certaine manière. Raconter à Da In tout ce que j'ai vécu c'est la moindre des choses. Elle est mon amie et je l'ai beaucoup trop négligée par le passé. Je n'aurai pas du agir comme ça, jouer au silence radio. Je ne m'en rendais pas compte mais, j'étais manipulée. Et c'est seulement à la rupture que je m'en suis rendue compte. J'ai fui, c'était mon unique moyen d'échapper à ses griffes. Et aujourd'hui je vois plus clair, je suis libérée mais déchirée de l'intérieur. Retrouver Da In est certainement le hasard, je ne suis pas croyante au destin mais pour une fois, j'en suis heureuse. Heureuse de retrouver mon seul point d'ancrage. Et c'est dans les bras de mon amie que je m'écroule une nouvelle fois. Les larmes tombent et libèrent la douleur. Ses paroles sont rassurantes et réconfortante. Ses gestes tendre et affectueux. Je suis si heureuse de te retrouver et de l'avoir quitté mais, j'ai encore tellement peur… Elle a raison je le sais, il ne me retrouvera jamais. Il n'aura jamais l'idée d'aller faire le tour du pays. Il ne pourrait se douter que je suis ici. Et puis s'il le ferait, je serai préparée à l'affronter et à me protéger. Je recule délicatement de notre étreinte, essuyant mes larmes encore chaudes. Da In arrive à me faire décrocher un sourire. Elle n'a pas changé, toujours aussi casse-cou et franche. Il est plus dangereux que tu ne le penses mais, je t'autoriserai grandement à l'éclater.

Un sourire étouffer puis je l'observe un peu plus mon amie. Je vois qu'elle est remuée de cette histoire, il y a de quoi. Cela me touche, je sais qu'au fond, malgré son apparence dur, Da In a un côté sensible et bienveillante. C'est aussi pour cela qu'on est amies. Elle a toujours su me réconforter et lire en moi comme un livre ouvert. Je souffle après avoir calmé mes larmes. Il ne faut pas que je craque, je dois rester forte. Maintenant que je suis à Jeju, je veux recommencer ma vie. Partir à zéro et l'oublier. Il y a des jours où c'est très difficile, d'autres moins. Maintenant que je sais que tu habites ici, je me dis que ce sera peut-être plus facile avec toi. Avec sa présence ce sera bien plus simple. La connaissant je sais qu'elle fera tout pour me soulager. Et je ferai la même pour elle, si elle était dans la même situation que moi. C'est alors qu'elle me propose d'aller chercher quelque chose à manger ou à boire. Je secoue la tête doucement. Ça ira ne t'en fais pas. Être avec toi me fais du bien, j'ai besoin de me reposer surtout je pense. Et c'est en retournant vers mon lit, sur lequel je m'assois, que je l'invite à me rejoindre. On a du temps à rattraper et je pense qu'elle a des choses à me raconter. Tu habites dans quel coin de Jeju du coup ? Il faudra qu'on se voit, j'espère que votre installation s'est bien passé en tout cas avec ton petit-frère. Tu fais quoi maintenant Da In ? Les yeux encore brillant, je l'observe continuellement. Elle a l'air d'aller bien. J'ai envie qu'elle me raconte un peu sa vie, afin de me changer les idées et de ne plus penser à l'homme qui à ruiné ma vie.

dain n'a jamais été une grande empathique dans l'âme. dans le sens où elle n'a jamais été la mieux placée pour réconforter. dain, c'est plutôt la pote que l'on vient voir pour se changer les idées autour d'un verre une fois que les larmes ont pris le temps de sécher. dain, elle est dans les gestes et non pas dans les mots. elle ne discute pas, elle agit. mais, aujourd'hui, pour kyô qui est si précieuse à ses yeux et à son cœur, elle tâche de savoir trouver les bons mots. et elle est plutôt fière de constater que cela semble fonctionner. la nippone se détend. doucement mais sûrement. et c'est tout ce qui compte.

le nez dans sa chevelure de jais, le parfum de la brune vient lui chatouiller les narines. c'est un véritable effet madeleine de proust qui arrache un sourire à la plus jeune. kyô ne change jamais de shampoing. c'est toujours la même odeur qui flotte dans l'air depuis des années qu'elle la connaît. comme une marque de fabrique qui perturberait tout un monde d'habitudes si cela venait à être remplacé. à moitié bercée, dain ne perd pas pour autant le fil de la discussion. hm, tu sais... faut pas avoir peur de lui. c'est exactement c'qu'il attend de toi. alors lui donne pas ce plaisir. il le mérite clairement pas. un rire lui échappe alors qu'elle arque un sourcil. ah ? parce que je dois attendre ton autorisation pour lui refaire le portrait ? j'comptais y aller en freestyle.

maintenant qu'elle ne pleure plus, dain retrouve doucement la kyô qu'elle a toujours connue. bien plus vaillante qu'elle ne laisse paraître.

alors que la brune vante les bienfaits de sa présence, la principale intéressée sent ses joues s'empourprer. c'est pas jojo la flatterie, t'vas me faire rougir. mais, n'est-il vraiment question que de flatterie ? qui sait.

lorsque kyô parle de besoin de se reposer, dain hésite à lui proposer de repasser plus tard. mais, elle est coupée dans son élan. le geste l'invitant à s’asseoir contredisant clairement sa pensée. non. son amie ne veut pas qu'elle s'en aille. elles ont du temps à rattraper alors, la blonde suit son aînée. se laissant, contrairement à elle, tomber sur le matelas. face rivée vers le plafond. je suis en périphérie. ni trop dans le brouhaha ambiant, ni trop dans la campagne. c'est plutôt cool ! et l'installation s'est passée tranquillement. nos parents étaient plus stressés que nous, j'dirais. et daeho s'est fait quelques potes déjà. je suis rassurée de voir que les gens ici sont visiblement moins cons qu'à busan, par rapport à sa surdité. oui, il n'y a pas à dire... la grande sœur préfère voir le sourire s'épanouir sur les lèvres de son cadet plutôt que de le voir, comme autrefois, pleurer. et je suis toujours étudiante. j'recule les responsabilités d'adultes, tu vois ? elle rit. je sais pas si tu t'souviens mais... j'passais mon temps à dessiner sur le coin de mes cahiers au lycée. bah maintenant... mes croquis de vêtements qui me valaient des points en moins au niveau de l'attention portée aux cours, c'est mes projets à rendre pour valider mon année. et j'suis vendeuse en parallèle. parce que bon... on se tape l'incruste chez mes grands parents, mais, comme ils travaillent plus, je fais en sorte de pas abuser de leur argent. donc je file un coup de main financier avec ma paie. de base je voulais pas prendre un appart parce que je savais pas si daeho s'intégrerait bien. mais, ça à l'air d'aller. puis il est assez grand pour ne plus avoir besoin que je joue les interprètes. je verrais d'ici la fin de l'année universitaire, si je me trouve un petit loft ou pas. et toi alors ? faut bien que tu me files ton adresse. je viendrais squatter en ramenant macdo comme quand on avait 16 ans.