L’histoire de sa potentielle futur belle-soeur laisse à désirer, il est vrai. En un sens, elle est sûrement tout aussi, voire plus à plaindre que lui. Vivre en ne connaissant pas l’amour de ses parents, ça paraissait inconcevable pour Misun. Il ne comprenait pas comment c’était possible de faire des enfants, et de les traiter de la sorte. D’un autre côté, le jeune homme ne peut pas s’empêcher de penser qu’au moins, ils ne sont pas morts. Il a du mal à faire preuve d’empathie vis-à-vis de la situation de la jeune femme, pourtant, il s’efforce de ne faire aucune réflexion déplacée.
Pourtant, la volonté d’essayer de comprendre ne lui semble pas si réciproque que ça. Après tout, elle lui fait bien comprendre qu’elle ne cherche pas à s’excuser. Plutôt, elle dit que le blesser n’était pas son but. A quel point fallait-il être stupide pour ne pas comprendre que parler de mariage à quelqu’un qui vient de perdre sa fiancée, ce n’est pas délicat ? Ce n’est pas comme s’il l’avait dit juste avant, mais non, elle avait balayé le sujet sur le mode « et au fait ! ». Quelle légèreté, vraiment. Même si ça fait partie de sa vie, il y a des façons de faire, et ça, ça n’en était pas une. Misun ne laisse pas passer. Ça ne passe pas c’est toujours coincé en travers de sa gorge. Il la regarde parler peu convaincu par le propos de la jeune fille, mais d’un autre côté, il n’a pas envie de se fatiguer en se battant pour de telles choses. Mieux valait passer son chemin.

Encore une fois, elle balaye le sujet comme si ce n’était rien. Avant de se présenter à nouveau, l’air de vouloir reprendre sur de bonne base. Elle rigole. Misun incline seulement la tête légèrement ; il est l’aîné des deux et après tout, leur niveau de vie différents ne changeait rien à ce fait-là.

— Non, je vais plutôt aller manger quelque part.

Elle sourit et lui tend son téléphone. Elle veut son numéro maintenant. Misun semble hésiter une seconde, mais l’écrit avec une certaine détermination. Après tout, rien ne l’obligeait à répondre aux messages, à répondre à ses appels. A l’inverse, il n’est pas obligé de lui envoyer de messages, ni même de l’appeler. Et puis au moins son beau-père lui foutrait la paix. Mee Joo insiste de nouveau sur le fait qu’elle voudrait repartir sur de bonnes bases, notamment qu’elle n’est pas celle qu’il croit. Mais sinon qui ? Misun n’y croit pas vraiment. Et pour l’instant, il n’a pas envie de rester davantage avec Mee Joo, malgré toutes les bonnes intentions qu’elle peut avoir. Il avait besoin de digérer la situation, il ne pouvait pas laisser glisser là maintenant tout de suite, il allait falloir du temps.

— On verra, dit-il simplement.

C’est une façon de répondre à ces deux dernières tirades : on verra si tu es bien celle que tu prétends être et on verra si j’ai envie de te revoir. En ayant marre d’être assis, il se lève avant de dire :

— Maintenant tu m’excuseras, mais j’ai vraiment besoin d’aller manger.

Il incline légèrement la tête en guise d’au revoir avant de tourner les talons et de s’éloigner de la jeune fille.