Elle avait ce petit côté innocent qui plaisait au footballeur. Une sorte de candeur, en contraste avec l’image qu’il s’était fait d’elle sur son lieu de travail. Cette même image qu’elle avait su entretenir durant tout leur périple jusqu’à cette fameuse chambre et leurs pratiques ô combien peu religieuses… Se confrontait-il finalement à la « réelle » Jisu ? Cette idée était-elle vraiment en train de l’enthousiasmer ? Bien sûr. Il ne désirait pas spécialement avoir affaire à une chimère, préférant la découvrir telle qu’elle était… Le fait d’avoir terminé ses petites affaires avec elle ne retirait en rien son intérêt pour elle. Cette partie de jambes en l’air n’avait fait que confirmer un fait évident ; sexuellement, c’était le must de ce qu’il pouvait espérer avec une femme ! Alors bien sûr, sa personnalité n’avait rien si important si leur lien n’outrepassait pas ce stade bien précis… Sauf que Luka était à l’opposé du genre queutard, adeptes des coups d’un soir… Avec lui, c’était plutôt des coups de plusieurs soirs, quitte à se montrer réaliste… Parce qu’il était bien incapable de se contenter de si peu. Il aurait l’impression de se servir des femmes comme de vulgaires objets. A choisir, il préférait encore utiliser sa main droite et importuner personne ! Cela n’empêche qu’il ne s’éternisait jamais très longtemps pour ne pas que l’attachement empiète à un moment ou à un autre, sur l’état d’âme de la demoiselle en question, ou sur même lui. Jusqu’à présent, il s’était toujours fait entendre sur ce point… Il le ferait aussi savoir à Jisu… Mais allez savoir pourquoi, il sentait que les choses allaient être un peu différents… Tout avait été différent depuis le départ... Et si tout cela était bien réel, il ne le réaliserait peut-être vraiment qu’au lendemain, au cours de sa matinée d’entraînement. Il y repenserait forcément, avec un sourire con sur les lèvres.

Ce chignon était définitivement trop marrant, aussi. S’il écoutait, il aurait déjà tiré et appuyé dessus, tel un gamin s’amusant avec son jouet. Il s’était toujours demandé comment les nanas parvenaient à rassembler leurs longues crinières de la sorte… Lui, il n’avait jamais eu les cheveux aussi long pour s’y essayer. Et loin de lui cette envie saugrenue ! Il la trouva juste adorable ainsi, et il prit sur lui pour ne pas la taquiner à ce sujet… Son image en prendrait sûrement un coup. Puisque oui, Luka, n’était pas juste ce prince aux yeux des femmes. Il était aussi le plus lambda des hommes dans son quotidien… Sauf que certaines choses se faisaient, et d’autres pas… Dans le cade d’une première rencontre, il ne lui viendrait pas à l’esprit de l’embêter comme s’ils se connaissaient depuis toujours ! L’impression était peut-être là, mais la réalité voulait que non. C’était très loin d’être le cas… Et il ne tenait vraiment pas à briser cette petite bulle de plénitude dans laquelle ils étaient. Se la jouer plus taquin dans le domaine du tactile, pour ça, il n’y voyait aucune objection. Cela n’avait rien de dégradant, tant pour elle que pour lui. Et puis dans le fond, il était sans doute un peu comme elle, à montrer une certaine personnalité en public, et une autre plus privatisée. La concernant, elle se situait un peu à cheval entre les deux… Elle avait l’exclusivité de le voir tel qu’il était dans la vie de tous les jours, même si pour le moment, il le lui cachait aussi l’autre vérité. Celle incluant sa profession… Mais ça, elle serait bientôt fixée, puisqu’il ne comptait pas préserver le mystère indéfiniment non plus.

Il venait de découvrir par inadvertance la deuxième faiblesse de la jeune femme, et il espérait bien continuer d’en apprendre davantage, maintenant qu’ils étaient lancés sur la piste des aveux. En tout franchise, il ne s’était jamais attendu à ce qu’elle soit autre chose que danseuse. Non pas qu’il la pensait incapable de jongler deux jobs en même temps, mais plutôt parce qu’elle n’avait pas nécessaire la tête de l’emploi ? Non pas que tous les tatoueurs se devaient d’être tatoués… Mais c’était un peu le cliché qu’il s’en faisait. Quand bien même, il trouvait cela plutôt cool, même si pour sa part, il ne possédait pas le moindre tatouage. Ni d’Eve, ni d’Adam, d’ailleurs. Elle venait juste de le surprendre une fois de plus ; preuve en est qu’il ne fallait jamais se fier à un livre d’après sa couverture. « Wow. Ok… Et t’as réussi à caser un peu de ton temps pour moi, ce soir ? Je me sens honoré. » Il plaisantait mais il ne le pensait pas moins d’une certaine façon. Les probabilités pour qu’ils se rencontrent et qu’elle daigne passer du temps avec lui se révélaient de plus en plus nulles… Et pourtant, ils avaient accomplis ce miracle, et il était bien forcé de constater que cette nuit, aurait pu ne jamais se passer comme ça… Plus sérieux cependant, le footballeur approcha un peu plus son visage de Jisu, ses bras se resserrant autour de sa taille dans une étreinte à la fois douce et chaleureuse. Il voulait aussi lui témoigner son respect, malgré la légèreté de ses précédemment propos. Il se devait bien de lui répondre le plus convenablement possible. « T’as du mérite… Je serais incapable d’en faire autant… Même si tatoueuse ? Je ne l’aurais jamais pensé, j’admets. ». Un petit rire glissa sur ses lippes, déjà moins ignorant qu’il ne l’avait été même si beaucoup de questions restaient en suspend. Il fut tout autant soulagé qu’elle le prenne ainsi et qu’elle rigole de sa phrase, précédemment balancée. Une possible crainte d’écartée, et d’une !

Luka la sentit totalement se détendre à l’intérieur de ses bras. La question ne tarda bien évidemment pas à lui être posée, et juste avant qu’il ne se prononce, il avait souris tendrement en la voyant jouer avec les bulles du bain moussant. D’instinct, sa main droite rechercha à en éclater une qui se rapprocha dangereusement de son visage. Son sourire ne daignait plus s’effacer de son visage, presque autant confiant de ce qu’il s’apprêtait à avancer comme s’il s’agissait de la pluie et du beau temps. Il n’y pensa pas à deux fois lorsqu’il prononça ses quelques mots. « Je suis footballeur. » Et rien de plus à ajouter, parce qu’il ne voyait pas vraiment ce qu’il y aurait de plus à préciser. Elle avait eu juste dans son raisonnement, mais en même temps, elle aurait été bien aveugle pour ne pas le deviner… « Le tattoo… C’est quelque chose que tu as toujours voulu faire ? J’imagine qu’il n’y a que les passionnés pour faire de leurs corps une véritable œuvre d’art… ? » Il revenait là-dessus, tout de même intrigué par ce choix de vie, et le fait même de ne rien avoir sur elle. Ce n’était pas péjoratif, loin de là. Il s’intéressait juste à elle et aux choix qui l’avaient poussé à faire ce métier. Les dessous de son passé, il n’en avait évidemment pas la moindre idée. « On peut sortir dès que tu en as marre. » l’avertit-il au sujet de leur bain qui perdait petit à petit de sa chaleur, à force de rester statique. Surtout, il ne voulait pas la forcer si jamais elle ne se sentait plus de rester ainsi, contre lui. Et avant qu’elle ne lui réponde, le jeune homme se redressa en douceur pour s’emparer d’un petit savon, couleur miel, qu’il ramena sous son nez pour en humecter le parfum en question. Il s’agissait bien de miel, avec une touche subtile de vanille. « Je te le passes sur ton dos ? » Après tout, il était aussi question de se laver, non ?

Préjugé, se fier à l’apparence, rigoler, blessé. C’est la vie que j’ai actuellement. Je ne laisse rien paraître évidemment. Vous ne savez pas ce que c’est de ne pas être reconnue pour un métier que tu aimes malgré tout. Personne ne le sait. En voyant les clients entrer dans mon atelier de tatous et me voient moi uniquement. «Où est le tatoueur?». C’est une question bien simple, mais qui fait mal qui revient régulièrement. Le vrai tatoueur, celui qui était le principal concerné et lui qui a créé cet atelier, il est mort depuis maintenant trois ans. Trois ans que j’ai vu la mort s’en emparer. Trois ans que j’ai commencé mon calvaire de travailler sans arrêt. Je ne sais pas comment je fais pour tout encaisser tout ça. Encaisser les regards interrogatifs et les rires qui se moquent de moi en me traitant de page vierge. Je ne sais pas comment je fais. J’ai appris à boucher mes oreilles, à ignorer. À mettre en sourdine tout ce qui est blessant pour ne pas avoir mal, mais qu’est-ce qui fait plus mal que de voir ton fiancé mourir sous tes yeux? Qu’est-ce qui fait plus mal alors de t’apercevoir qui tu as hérité de son atelier et ses dettes qui en suivent? Je vivais bien, sans problème avant tous ses problèmes qui sont maintenant les miennes. Je n’ai pas énormément fait de bons choix dans ma vie, mais j’aimerais reprendre ma liberté et vivre comme je l’ai toujours aimé la vivre; en paix. «Pour être honnête, tu es pile tombé sur ma journée de congé.» lui ai-je dit en rigolant avec lui.

J’y pense. J’aurais pu me tatouer comme dans les clicher. J’aurais pu, mais j’ai promis à quelqu’un de ne pas le faire et aussi je ne m’en vois pas l’intérêt. Je ne vois pas l’intérêt de montrer mon art tel un paon qui déploie sa queue de plumes quoique j’aurai bien aimé être une artiste qui vend ses œuvres comme Picasso ou Leonard De Vinci. Ça, ça reste un rêve bien enfouie qui ne réaliseront pas, malheureusement. Le commentaire de Luka quand j’ai révélé que je suis tatoueuse. J’ai ressenti un compliment venant de sa part même s’il semble surpris de mon métier. C’est la réaction habituelle que j’ai envers les nouveaux clients, mais spécialement de lui, ça me touche beaucoup. Les bulles ne m’ont jamais passionné autant que cette fois. Prendre la mousse du bain et faire des bulles peuvent paraitre enfantin, mais au moins ça me permet de garder un cœur jeune malgré les souffrances que j’ai vécu. Sauf qu’une bulle rebelle se fait un chemin vers le visage du prince, le sourire amusé que j’ai affiché alors qu’il la touche seulement avec un doigt avant de s’éclater. Voilà que sa réponse est arrivée; telle une bulle qui a explosé. Ça répond à beaucoup de questions dans ma tête. Pourquoi est-il si athlétique? Pourquoi est-il si aisé financièrement? Pourquoi m’a-t-il dit son nom au complet comme s’il était une vedette? Un footballeur professionnel sans doute. Je suis très observatrice puis lorsque les quelques personnes l’ont vu avec des yeux brillants, ça dévoile des secrets qu’il tente de cacher peut-être. Peut-être m’a-t-il testé pour savoir comment je réagirai en le reconnaissant? Hélas, je ne suis pas une groupie ni celle qui va regarder des parties à la télévision, car justement je n’ai pas le temps. Je n’ai pas beaucoup de temps libre donc le passer devant une télévision – que je n’ai pas – serait une perte de temps. En fait, ça peut être même une star de cinéma ou un politicien célèbre et je n'en ferais pas de cas. C’est respecter la vie des autres.

«J’en ai pas marre, je suis bien… mais c’est vrai que l’eau se refroidit.» L’eau d’un bain qui semble si chaude à mon souvenir et maintenant elle perd peu à peu sa chaleur réconfortante qu’elle peut nous procurer. En si bonne compagnie, je passerai bien des heures si la température peut rester stable. Malheureusement, toute bonne chose à une fin comme à nos débats de tout à l’heure. J’aimerais bien que le temps s’arrête, qu’on puisse discuter sans que rien ne nous dérange. La fois que j’ai failli l’embrasser sous le lampadaire et que le chauffeur de taxi est arrivé. La fois où qu’on s’est roulé une pelle et que ce même chauffeur a eu énormément de misère de nous séparer. La fois où que l’ascenseur s’est mise en route alors que notre libido était au plus haut niveau d’excitation possible. Tous des points que j’aurais voulu que le temps s’arrête et peut-être voudrais-je plus encore des moments comme ceux-là? Je lui présente mon dos en guise de réponse en souriant. « Si tu veux, tu peux le passer ailleurs que le dos.» Voilà, c’est à mon tour de lui tendre une perche comme avec cette fameuse sucette. Est-ce que lui aurait le courage d’aller plus loin? C’est en lui jetant un regard amusé que je lui laisserai pas cette chance. Seulement pour l’agacer.

«Pour le tatou… J’ai toujours aimé l’art, mais j’ai toujours apprécié de les créé sur les toiles ou du papier que de marquer dans la peau des clients. C’est sûr que ça dépend de la mentalité des personnes, mais un tatou est censé être basé sur une signification propre, mais pour d’autre c’est de l’apparat que d’autre chose.» ai-je dit concernant sa question de toute à l’heure. Ce n’est pas un automatisme dans la façon que je lui ai dit, mais c’est ma façon de penser concernant les tatous et bien souvent ces mêmes personnes d’apparat trouveront stupides cette façon de penser. On m’a lancée sur ce sujet. En souriant, j’ai pris doucement son bras de disponible, il faut décidément que je continue mes explications. « C’est comme si je te faisais une demie-manche. Un tatou qui part du coude et qui va jusqu’à ton épaule. Tu décides de vouloir un dessin tribal juste pour le style. Alors que si je te faisais un ballon de foot avec un numéro inscrit dessus, parce que ton idole que tu adorais avait ce numéro-là, là c’est une signification un peu plus profonde… Oh! Désolée…» Je me suis excusée, oui, mais je me suis dite que mes explications auraient pu l’ennuyer. Après tout, mon métier est mon art. C’est comme si je lui poserai la question s’il a toujours voulu être un joueur de foot? Sûrement qu’il se lancerait dans les explications, mais dès qu’on me tend une perche comme ça sur mon vrai métier, je me laisse aller c’est plus fort que moi. «Est-ce que ça fait longtemps que tu joues au foot? Puis, il va falloir que tu me montres comment y jouer, ça pourrait être amusant…» lui demande-je en mettant retourner un peu plus vers lui. Je sais pertinemment ce que c’est le football, mais je n’ai jamais appris à y jouer et même à m’intéresser davantage puisque je n’ai justement pas le temps libre. Sauf que si j’ai du temps libre comme demain, je pourrais m’occuper de la sorte, non? Puis qui sait, ça pourrait nous donner la chance de se revoir pour laisser le doute du «un coup d’un soir» disparaître pour de bon, non?

Lorsqu’elle lui avait révélé être en congé, sa première réaction avait été de froncer les sourcils d’un air surpris. Les probabilités n’étaient-elles pas plus restreintes encore ? Il fallait croire que la vie avait été ainsi faite pour qu’ils se côtoient à ce moment précis de leur existence… Parler de destin ne lui ressemblait pas – et il n’y croyait pas non plus – mais il se devait bien d’avouer que les événements s'enchainaient à leurs avantages… Était-ce une occasion ou un prétexte bien amené pour donner une suite à cette folle escapade ? Etait-il bien raisonnable de s’accorder un second round, alors que le mot « raisonnable » ne s’était à aucun moment fait une place dans cette histoire ? Et était-ce vraiment utile de se poser la question, alors qu’il était encore bien incapable d’écourter cette nuit, alors que tous les éléments les amenaient progressivement à une fin prochaine…?

A cela, Luka avait donc relâché un rire en écho avec le sien. Un rire un peu gêné, mais qu’il camoufla comme si de rien n’était par l’intermédiaire de la plaisanterie, comme toujours. « Ah ? Je suis vraiment chanceux, alors… Si je comprends bien, tu es libre demain ? » Une interrogation pas si anodine, bien sûr. Mais c’était peu de chance pour lui puisqu’il serait occupé une bonne partie de la journée au stade pour son entraînement habituel. L’équipe se préparait depuis quelques semaines au prochain match amical qui aurait lieu sur la pelouse du stade de Seogwipo. Un match contre les Busan Ipark… Perdre sur leur propre terrain n’était évidemment pas envisageable. Même si aujourd’hui, Luka plus qu’un simple remplaçant, il participait systématiquement aux quinze dernières minutes de la partie. Son entraîneur espérait toujours après un retour triomphant de sa part… Ces derniers temps, son jeu s’était semble t-il un peu amélioré, malgré son statut persistant de cheonyan.

Ce n’était pas une illusion. Jisu lui confirmait également que la température n’était plus tout à fait la même… Pourquoi est-ce que les bonnes choses ne duraient-elles jamais plus longtemps ? Sans doute, pour les forcer eux, pauvres mortels qu’ils étaient, à davantage apprécier chaque seconde et chaque minute que la vie avait leur apporter… S’il avait été doté d’un pouvoir comme se le comptait les légendes, Luka aurait sûrement souhaité arrêter le temps. Il s’imaginait bien qu’une telle faculté se limiterait aussi sur la durée… mais cela lui aurait sauvé la mise à de nombreuses reprises… Pendant un examen important, une collision pouvant causer des dégâts matériels… ou pendant un match pour marquer ni vu ni connu un but, sans personne pour interférer autour de lui. Nul doute qu’il en aurait abusé pendant les moments un peu plus intimes comme celui-ci, pour que l’eau reste plus longtemps à bonne température. Pour que cette femme ne disparaisse pas trop vite de son champs de vision… « Recommence pas... » la menaça t-il en étirant un large sourire. Il s’était retenu cette fois-ci de la traiter de « maline » même si son regard en disait long. La proposition avait beau mériter davantage de considération, il ne fit rien de plus que de se redresser pour glisser le savon sur sa peau, traçant des lignes sur son dos dans l’intérêt d’émulsionner au mieux le cosmétique.

Il ne s’était cependant pas attendu à ce qu’elle s’exprime autant sur son métier. Les sourcils de nouveau haussés face à son monologue, un rictus ne tarda pas prendre effet sur son visage alors qu’il enregistrait avec une certaine attention les informations données, sans s’arrêter dans son activité. A la première tirade, il avait également relâché le savon dans un coin de la baignoire pour replonger sa main dans l’eau. Juste assez pour la réchauffer, alors qu’elle s’empara de son autre bras restée contre elle pour poursuivre son explication avec tout son sérieux. Ses excuses à la fin, lui arrachèrent un rire, pas juste pour cette petite maladresse – qui n’en était pas vraiment une – mais plutôt pour l’anecdote qu’il trouva très marrante, à propos de son idole ! Autant dire qu’il fut incapable de retenir sa langue lorsqu’il s’exclama d’un ton plus léger. « Et si je me faisais tatouer mon propre numéro, est-ce que ça ferait de moi un narcissique ? » Il ria de plus belle, amusé par sa propre connerie. Se tatouer un ballon ou un chiffre ? Jamais de la vie ! Il avait beau vivre de sa passion et défendre les valeurs du football, le tatouage ne l’avait jamais intéressé ailleurs que sur les autres. Ou alors, il faudrait effectivement qu’il se trouve une idée plus approfondie... S’attribuer un tribal juste parce que ça faisait viril ou pour suivre un effet de mode, non merci.

Si cela faisait longtemps qu’il jouait au foot ? Bizarrement, il avait presque l’impression d’une question piège, dans la mesure où il n’avait jamais rien fait d’autres que ça… Sauf peut-être, durant son stage découverte obligatoire, avant d’entrer au lycée ! « Officiellement ? Ça doit faire… quatre ans. J’avais dix-huit ans quand mon entraîneur m’a repéré… C’était durant mon année de terminale, en 2015. » Il ressortait des dates plus pour lui-même, sous la réflexion instaurée. En soi, il ne lui avait pas révélé son âge, tout comme il ignorait totalement le sien ! Si elle était bonne en calcul, elle pourrait de ce fait, trouver le sien ! Et s’il ne l’avait pas questionné à ce sujet, c’était aussi parce qu’il s’en fichait, et parce qu’il savait les femmes légèrement plus susceptibles dès qu’il était question de donner un âge ! Quand bien même, Luka s’imaginait parfaitement Jisu dans la même tranche d’âge que lui. De un, il doutait qu'elle puisse avoir au-dessus de la trentaine et pour travailler dans un club, n'était-elle pas légalement majeure dans tous les cas ? « Ça se négocie… Je gagnerai quoi à coacher une petite novice comme toi, dis-moi ? » la taquina t-il, son regard ancré de sous-entendus. N’était-elle pas en train de lui faire comprendre qu’elle voulait le revoir dans d’autres circonstances ? Difficile pour lui, d’interpréter la chose autrement. Tout autant qu’il fut incapable de ne pas sourire sous cet aveu. Qui plus est, il avait la nette sensation qu’ils auraient l’un comme l’autre, bientôt froid dans cette baignoire… L’idée d’aller se réfugier au chaud sous les couvertures germait tout doucement dans sa tête. Même si pour l’instant, il profitait encore de ces quelques moments avec Jisu, sans ressentir la moindre appréhension.

Congé. Un congé semble si loin en arrière quand j’y pense. Depuis quand j’ai pris un congé comme ça sans personne qui me dérange pour venir la remplacer? Depuis quand j’ai pu prendre un congé pour être avec moi-même et vivre que bon me semble? C’est si lointain, je ne peux pas compter comment de jours d’affiler que j’ai travaillé pour arriver à un pareil congé. Ça fait deux semaines? Trois? Un mois? Je ne me rappelle pas. Je ne réalise pas encore que j’ai enfin eu un congé, je pourrais faire ce que j’ai voulu faire : vivre. C’est sûr que ça va me faire bizarre de ne pas travailler puisque c’est devenu routinier. Se lever, bouffer, tatouer, bouffer, tatouer, bouffer, danser et dormir. C’est ce que je faisais tout comme payer les dettes qui ne sont pas les miennes. Qui l’aurait cru que j’ai pu tomber dans tout cela. Prédire l’avenir, j’aurais aimé ça de découvrir ce que mon avenir puisse me réserver pour justement éviter les bêtises que j’ai pu faire. Éviter de vivre pour survivre, s’en ai ridicule. Cette fois, pour avoir eu un coup comme l’homme auprès de moi, je ne le changerai pour rien au monde. C’était une foutue bonne baise depuis des millénaires… J’avoue que mon manque de chair ne m’aide surtout pas à juger sa prestation. Puis, il va falloir que je me calme. Je ne suis pas rassasiée du manque de chair et j’ai l’impression que je vais fuir mon gibier si je deviens trop insistante. Il ne faut pas que je revienne dans mon ancienne vie comme je l’étais avec mon ex; dépendante de quelqu’un.

Les coïncidences, ils en ont de plus en plus. Plus flagrantes et plus subtiles. Le fait qu’on tombe irrévocablement dans les bras de l’autre pour batifoler et rester prendre un bain. Discuter comme si on l’a toujours fait. Se laver comme on a toujours fait ensemble. C’est trop bizarre pour que je l’apprécie entièrement les choses. Ce hasard me fait peur. Je ne veux pas que ça déboule et qu’on devienne rapidement accro à l’autre pour finir entendre une cassure dans le cœur de chacun. C’est trop… Trop parfait que ça devient effrayant. Une plaisanterie, c’est louche cette histoire. Suis-je libre? On peut tout faire durant une journée de congé même si on le book. Quoi? Non, je ne passerai pas ma journée à paresser comme certains le font sûrement. Je ne paresse pas, je reste active quoiqu’il arrive. J’aime les journées bien remplies, j’aime quand j’ai quelque chose de prévu. J’aime quand je dois faire des tas de choses. Est-ce que je devrais lui répondre ou pas? Non, s’il tient réellement que je sois libre, il me reposera la question. Il faut que l’homme aille chercher ce qu’il veut et non tout cru dans le bec ou sous la bouche si on se fie aux aventures dans le lit plus tôt. Non, il n’allait pas être servi sur un plateau d’argent. Je souris, amusée en le toisant du regard. Quel homme.

Se tatouer son propre numéro? Je hausse le sourcil, curieuse, de sa demande… Enfin de sa blague. On ne fait pas ça à moins d’être narcissique. On ne fait pas un truc pareil à moins que se soit une valeur sentimentale. Comme un ancien joueur qui s’est blessé et qui ne pourra plus jouer, c’est une signification plus profonde. Un tatou c’est un art. Comme les chefs-d’œuvre au musée du Louvre. Les toiles ont toute une signification et les artistes ont eu une raison bien à eux d’avoir pu peinturer un truc pareil. C’est comme si je prendrai une toile blanche et je peinturai une ligne rouge en plein milieu. Bien droite. Simple. Rien de si extraordinaire à première vue, mais il a sûrement une justification pour que cette ligne rouge soit là. Le blanc, un vaste univers, un vide et une ligne peut signifier une personne. On peut bien interpréter de biens des façons, mais la vraie réponse reste un secret caché de tous. C’est ce que j’aime dans l’art. On peut tout afficher sauf quelques personnes auront la pensée la plus loufoque d’avoir la mentalité de l’artiste à ton plus grand étonnement. Par exemple, la ligne rouge ci-dessus; est seulement une ligne rouge sur du blanc. Cela apporte une réflexion approfondie et bien souvent c’est du n’importe quoi. Ceci dit, j’ai bien ri à sa blague. On ne me l’a jamais fait ce coups-là. Donc voilà, on ouvre une porte et il est celui qui dit des blagues? Intéressant. Il ne veut pas devenir humoriste? « Juste un peu.» l’ai-je piqué en envoyant quelques gouttes à sa direction en rigolant. J’en profite également de rincer mon dos, l’eau devenant peu à peu froide ce qui m’a fait frissonner. L’eau du bain n’est pas encore froide, mais l’eau chaude qui tire légèrement vers une eau tiède? Je me colle contre lui après avoir pris le cosmétique qu’il a pris pour me laver le dos. Il faut bien que je finisse, il n’a pas voulu faire entièrement le travail que je lui ai gentiment demandé.

Savonnant tout le corps alors qu’il mentionne qu’il a fait ses débuts à ses dix-huit ans. Donc 2015 et on est en 2019, si je calcule bien, il a vingt-un ans? Plus jeune que je lui donne, je lui aurais donné dans les alentours de mi vingtaine. Je n’ai rien contre les plus jeunes, mais les hommes étant plus jeunes sont plus souvent bien immatures. Malgré que les hommes bien plus vieux peuvent être autant. C’est rare que la gente masculine soit mature alors qu’ils viennent à peine d’atteindre leur légalité pour sortir et aller dans les clubs. Techniquement, la réalité étant comme ça, pratiquement Luka ne ressemble pas à être celui qui suit la débauche de gauche à droite dès qu’il le pouvait. De toute façon, il a été invité à un enterrement de vie de garçon, j’aurais du mal à l’imaginer venir dans des endroits, comme plus tôt dans la soirée, de son plein gré. Je peux me tromper puisque je ne le connais que de façade et non profondément. Je parle au sens figuré, arrêtez vos arrières pensées. Puis, une offense arrive aussitôt à mon oreille quand j’ai déposé le savon et en me rinçant. Une petite novice? Vient-il tout juste de m’insulter? J’ai souri en sortant du bain. Prenant en chemin une serviette. Je le regarde avec un large sourire taquin comme lui. Prenant du bout des doigts son menton pour l’attirer vers moi tout en me penchant vers lui. Je suis plus redoutable qu’il ne le croit. J’apprends très vite. « Tu verras si tu veux coacher une petite novice comme moi. On peut parier pour pimenter les choses, monsieur le professionnel.» ai-je dit en me rendant à proximité de ses lèvres. Frôlant ses lippes avec les miennes: « Qu’est-ce que tu en penses?» lui ai-je murmuré avant de déposer un baiser avant de me redresser.

Une serviette étant un réconfort en ce moment. La fraîcheur de la pièce me caresse un peu trop le corps qui s’enveloppe de chair de poule. Même si c’est peu, ça bloquait un peu les frissons pour me réchauffer un peu. C’est en m’enroulant autour de mon corps que je dirige vers la porte. Qu’il sorte rapidement du bain avant qu’il prend froid.

Il était vrai qu’elle avait eu le droit à plusieurs facettes de sa personnalité. Luka avait su mettre en avant son côté joueur et entreprenant – et tout à la fois respectueux – Plus les minutes défilaient, plus il lui offrait aussi un bref aperçu de ce qu’était son humour. Généralement lorsqu’il plaisantait ainsi, c’était quant il appréciait un minimum la personne au point de sentir parfaitement à l’aise. Autant, ce jeu de séduction l’avait enthousiasmé comme jamais, tel un objectif un atteindre, un challenge qu’il s’était de lui-même fixé… Maintenant que le but avait été réalisé, le soupçon de gêne ou de pudeur qu’il pouvait tout de même avoir à son encontre, s'était envolé ! Ils avaient brisé la glace sans préavis. Ils étaient presque tombés trop facilement dans les bras de l’autre… Mais n’était-ce pas ce qui avait rendu chaque instant plus excitant ? N’était-ce pas ce qu’il aurait aimé préserver par la suite ? Tout était toujours possible, à partir du moment qu’il ne s’attachait pas trop et qu’il ne limitait aux stricts nécessaires. S’entend par-là, au minimum à savoir sur elle ; parce qu’il aurait été bien incapable de poursuivre d’autres parties de jambes en l’air en n’ayant toujours pas la moindre idée de qui il avait affaire !!

Ce moment passé à deux dans le bain était aussi étrange qu’agréable… N’était-ce pas un concept, de faire connaissance d’une telle façon ? Personnellement, ça ne le dérangeait pas. Il préférait ça à un face à face désarmant… Il préférait joindre l’utile à l’agréable… Qui plus est, il avait aussi la nette impression qu’elle se dévoilait un peu plus sans paraître trop éprise de lui ? Il en avait douté, mais au bout du compte, son attitude et les quelques répliques qu’il avait su réceptionner laissèrent à penser qu’il était peut-être loin du compte. Peut-être partagerait-elle le même désir que lui, pour ce qui était de la suite de leur relation ? Il ne tenait pas franchement à la définir. Il ne voulait pas la considérer comme une « amie » ou comme un vulgaire coup d’un soir… Il voulait juste, profiter de l’instant présent, sans se prendre la tête. Sans avoir constamment à se demander si ce qu’il fait est juste ou non… De ce qu’il sache, il ne lui avait jamais manqué de respect jusqu’à présent. Et cela ne changerait pas à l’avenir. Jisu était un mystère encore entier dans sa globalité. Et ce mystère se devait d’être préservé pour ne pas avoir à retirer tout le charme de son personnage, et de cette rencontre hors norme.

En la voyant ressortir du bain pour lui attraper le menton, il n’avait pas pu s’empêcher de frissonner à sa place. A moins qu’il ne s’agisse de son corps nu pour le mettre dans tous ses états ? Qui sait… Il avait tout de même un peu froid pour elle, et il ne doutait pas qu’il en serait bientôt de même pour lui, dès lors qu’il se sera motivé à ressortir du bain… Celui-ci semblait encore plus tiède, depuis qu’elle s’en été extirpée. « Pari tenu. » avait-il alors soufflé dans une esquisse de sourire. Elle avait toujours ce petit côté impertinent pour assouvir son intérêt flagrant pour elle. Si elle le cherchait, elle le trouverait… Nul doute à ça. La façon dont elle le nomma avait également flatté son égo, tout en s’amusant de la situation. Elle savait plutôt bien le motiver en fait… Allez savoir si elle bluffait ou si elle saura le surprendre en bien des façons, une fois de plus… « J’en dis que tu mérites bien une chance… Qui sait, l’élève pourrait surpasser le maître. » Un autre sous-entendu bien placé, qu’elle saurait entendre ou non. Il se laissa alors embrasser sans ménagement. Ses prunelles ne la décrochèrent pas du regard lorsqu’elle s’enroula autour d’une serviette pour prendre la sortie de la salle. Pour sa part, il s’autorisa quelques minutes de rab, le temps de se laver énergiquement. A part se prélasser, il n’avait rien fait de plus jusqu’alors… Et ses mouvements étaient beaucoup plus fluides et mécaniques, puisqu’il bénéficiait de toute la place disponible pour vite se frictionner. Il en profita également pour nettoyer ses cheveux, l’eau de la baignoire pour disparaître progressivement de ses pieds dans un bruissement sonore.

Une fois qu’il fut fin prêt pour rejoindre son délice d’une nuit, qui l’attendait depuis l’autre côté de ces murs, son sourire s’accentua de plus belle, faute de pouvoir contrôler cette partie si expressive de son corps… Il revint vers elle et vers le lit qui avait été un peu arrangé depuis leur dernier passage. Luka était désormais vêtu d’un peignoir pour recouvrir tout son corps, ainsi que d’une serviette par-dessus ses épaules. Celle-ci étant plutôt pratique pour éponger les quelques gouttes qui tombaient de la pointe de ses cheveux. Le coréen se pencha ensuite pour attraper sa veste et son téléphone restée dans une des poches internes. Il put alors constater le nombre de notifications qu’il avait manqué depuis le temps passé en si charmante compagnie… Trop de messages pour vouloir les visualiser dans l’heure. L’envie et la curiosité n’y était pas, pour une rare fois ! Non, ce fut uniquement pour s’assurer de l’heure de son réveil et rien de plus. D’ordinaire, il n’en avait pas besoin puisqu’il était muni de ce que l’on nommait, une horloge interne. Mais dans le doute - et parce qu’on était jamais trop prudent - le footballeur paramétra l’heure à laquelle il souhaiterait s’extirper du lit. En prenant en compte qu’il devra bifurquer jusqu’à chez lui pour récupérer son sac et ses habits de terrain, il ne lui faudra pas traîner sur la route… D’autant plus qu’il se devra de rappeler un taxi. Le lendemain s’annonçait plutôt rude...

« Je tombe de sommeil... » s’exprima t-il en réprimant un bâillement, le poing levé contre ses lippes. Il ne lui fallut pas plus de temps pour trouver la chaleur et le confort de la couverture, son téléphone posé sur la table de chevet. Sans évidemment ignorer la présence de Jisu, le jeune homme se tourna dans sa direction pour la gratifier d’un sourire. « Tu voulais peut-être dormir de ce côté ? » Question stipulée avec légèreté, mais elle n’en restait pas moins importante. S’il s’écoutait, il dormirait tout simplement au milieu à force d’habitude, mais cela lui importait peu d’être d’un côté que de l’autre. Du moment que Jisu y trouvait son compte, il s’en fichait comme de l’an quarante ! Et ce fut le plus naturellement au monde qu’il l’observa sans se prononcer, la tête calée contre l’oreiller, espérant presque communiquer avec elle par télépathie. Devait-il lui proposer de se revoir ? N’était-ce pas un peu précipité ? Mais d’un sens, il avait bien compris qu’elle ne se libérait pas facilement de ses obligations… Il avait plutôt intérêt de saisir cette occasion unique. Et pourtant, il ne revint pas sur le sujet, ne trouvant pas les mots, pour une raison qui lui échappait totalement… En revanche, la fatigue était bien réelle. Et il se sentait de tomber d’un instant à un autre, dans les bras de Morphée… « Bonne nuit, Jisu. ». Ces quelques mots furent les seuls à se frayer un chemin sur ses lippes, alors qu’il se replaçait de dos sur le matelas, la main tendue vers la lampe de chevet pour en dissoudre la luminosité. Le sommeil ne tarda pas à s’emparer de lui…

Quittant la salle de bain bien satisfaite de ma victoire personnelle que j’ai eu envers Luka. Le pari est un prétexte pour le revoir et le football est sa passion donc encore plus de change d’attirer son attention. Je pourrais ainsi découvrir davantage sur sa personnalité qui prend tranquillement forme. Je commence à le connaître en tant que personne alors que ce n’est pas le cas pour moi. J’ai su qu’il avait 21 ans, un footballeur professionnel, qu’il est aisé financière – ce que je me fiche pertinemment – puis qu’il est gentil, attentionné et j’en passe. C’est un homme qui m’a mis rapidement à l’aise ce qui arrive très rarement. Un homme qui a des regards qui parlent pour lui. Une attitude si charmante que toutes les femmes qui tombaient comme des feuilles en automne sous son charme ce que j’ai remarqué. Il fallait que je sois celle qui ne tombe pas. Je ne veux pas tomber et être éprise de lui, pas maintenant. Sinon, où est le jeu de fréquenter une personne? Et puis, je ne suis pas celle qui révèle tout. Je ne suis pas celle qui va révéler sa triste histoire. Maintenant, il sait seulement que j’ai deux travailles et qu’il a pu entrevoir ma véritable personnalité. Le reste n’est que mystère et qu’il va falloir qu’il découvre par lui-même. S’il veut savoir mon âge?  À lui de voir. S’il veut savoir ce que j’aime manger? Qu’il le découvre comme quand on part pour une chasse au trésor. Qu’il me cherche et il me trouvera. Je suis le gros butin… dis comme ça c’est plutôt narcissique de ma part. Beurk.

En me dirigeant vers mon sac, j’ai eu le réflexe de prendre mon portable. Évidemment, il se fait très tard, mais ce n’est pas ça qui me dérange totalement. C’est le fait que j’ai eu de nombreux appels manqués et des notifications par rapport aux danseuses qui désirent avoir congé le lendemain puisqu’elles ont quelque chose de prévu. Tellement prévisible. J’ai une nette impression qu’One est derrière tout ça. Surtout avec ses nombreux appels… Il m’a sûrement vu avec le prince pour être si oppressant, mais je m’en fiche. C’est ma vie et non la sienne. Je ne lui appartiens pas et d’ailleurs je ne lui ai jamais appartenu. Il n’a jamais eu d’histoire entre nous et il n’aura jamais de nous. Il m’a aidé, je lui redevable, mais c’est tout. Il m’a aidé à m’en remettre pour mon ex et à me trouver un autre emploi, c’est tout. Il n’y a rien eu au-delà et il n’y aura rien d’autre. Justement, un autre appel de lui que j’ignore avec plaisir. Je suis vidée de toute énergie, je suis de bonne humeur et en bonne compagnie, rien ne changera cette soirée qui prend peu à peu fin. Doucement, tout en déposant mon portable dans mon sac, je défais mon chignon. Secouant un peu mes cheveux pour ne pas qu’ils restent figer à leur état précédent à cause de l’humidité. Tel un cliché, j’aurais pu prendre un de ses vêtements pour me couvrir lors du dodo, mais non, il faut garder une certaine gêne et peut-être que lui a quelque chose de prévu au matin qui sait? Mettant seulement mon sous-vêtement, que le bel homme a voulu «déchirer» plus tôt sous son impatience, et je me glisse sur le matelas. Confortable, invitant. Le sommeil me rattrape peu à peu, mais il faut que je sois réveillée pour ne pas dormir sous son nez.

Entretemps, j’ai pu le voir arriver affichant son merveilleux sourire que j’ai pu le redonner volontiers. C’est si contagieux, si automatique. On ne peut pas ne pas sourire en voyant une belle bouille comme ça. Comme un chien qui est content de voir son maître quand il revient d’une journée de travail, comment ne pas être heureux et de ne pas trouver mignon? Oui, Luka me fait penser à un chien, mais je ne suis pas sa maîtresse. Un chien fort sympathique qui adore voir de nouvelles personnes. Un canidé curieux qui secoue sa queue sous l’excitation puisqu’il vit dans le moment présent. Quand j’y pense, je n’ai pas pu le lâcher des yeux avec cette pensée, amusée. Je l’imagine avec une queue d’animal et des oreilles pointues ou tombantes. Allô, l’absurdité? Un homme-chien, où va mon imagination en dotant d’une grosse fatigue comme ça? Il a eu le même réflexe que moi; Il a pris son portable et j’imagine qu’il doit avoir mis une alarme lors du réveil. Nous vivions également dans un monde que le portable prend une grande place dans notre vie puisque c’est notre moyen de communication au lieu des téléphones publics. Donc, j’ai pu déduire qu’il a quelque chose de prévu le lendemain? C’est vrai qu’il ne m’a pas redemandé si j’étais libre. Pourquoi suis-je soudainement déçue? Triste? Est-ce un coup d’un soir? Toutes les probabilités pour me dire le contraire étaient fausses depuis le début? C’est incohérent. Et le fait qu’il me demande si je voulais dormir où il s’est glissé, je nage encore plus dans la confusion. «Non, non, je te laisse la place. » dis-je en déposant ma tête sur l’oreiller. Ainsi, il éteint la lumière à son chevet que je fais de même.

Qu’est-ce qu’on fait lorsqu’on sent une source de chaleur sous les couvertures, les filles? Bien sûre qu’on colle pour se réchauffer rapidement. Le bel homme s’est couché sur le dos et c’est un moment parfait pour voler sa chaleur. Je pourrais lui prétexter que j’ai froid – et c’est le cas – puis aussi que je m’endors facilement. J’y pense, ça fait longtemps que je n’ai pas dormi avec un homme. Espérons que ça ne lui dérange pas… Espérons que je réussi à fermer l’œil de la nuit. En m’approchant, déposant ma tête sur son épaule, je glisse ma main sur son torse. «Bonne nuit, Luka.» lui ai-je dit avant de m’endormir et aller dans les bras de Morphée. Je ne me rappelle pas depuis combien de temps je n’ai pas pu m’endormir aussi rapidement. Je ne me rappelle également pas combien de fois que je n’ai pas rêvé. Que je n’ai pas fait de cauchemar et que je ne me suis pas réveillée durant la nuit en sueur. Une nuit sans rêve, une nuit qui peut être réparateur. Ça fait si longtemps, j’en ai bien de besoin. Une nuit sans revoir la mort de mon ex, une nuit sans avoir d’angoisse de perdre quelqu’un qui m’est proche. Une nuit calme et paisible dans les bras d’un homme que peut-être que je le reverrai un jour comme le matin? J’y souhaite. Je ne me suis jamais sentie aussi bien de toute ma vie. Suis-je stupide d’espérer?